Un homme âgé de 77 ans souscrit un contrat d’assurance-vie sur lequel il verse la quasi-totalité de son patrimoine. Quatre ans après, il part vivre en maison de retraite et bénéficie d’une aide sociale du département pour la prise en charge de ses frais de séjour. Au décès de l’intéressé le président du conseil général, considérant que le contrat d’assurance-vie constituait en réalité une donation, exerce un recours en récupération des sommes versées au titre de l’aide sociale, soit environ 9 000 €, auprès du bénéficiaire du contrat. Ce dernier conteste la décision. La cour d’appel lui donne raison, estimant que la preuve de l’intention libérale du souscripteur envers le bénéficiaire du contrat n’était pas rapportée.
Censure de la Cour de cassation. Un contrat d’assurance-vie peut être requalifié en donation si les circonstances dans lesquelles le bénéficiaire a été désigné révèlent la volonté du souscripteur de se dépouiller de manière irrévocable (C. civ. art. 894). Pour se prononcer sur une telle requalification, les juges doivent s’expliquer sur les circonstances relatives à l’âge du souscripteur, l’importance des primes versées et l’utilité du contrat pour ce dernier.
En se bornant à constater, par des motifs généraux, que la preuve d’une intention libérale du souscripteur n’était pas rapportée, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision.
À noter : Cet arrêt confirme la possibilité de requalifier en donation un contrat d’assurance-vie pour permettre la récupération, auprès du donataire, de certaines aides sociales perçues par le souscripteur défunt (pour une illustration, Cass. 1e civ. 13-3-2008 n° 05-15.306 F-D).
Pour mémoire, l’État ou le département peut exercer un recours en récupération des sommes avancées contre le donataire lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande d’aide sociale ou dans les 10 ans qui ont précédé cette demande (CASF art. L 132-8, 2°). Ce texte permet notamment de récupérer les frais d’hébergement des personnes âgées et les aides à domicile pour les personnes âgées ou handicapées.
Depuis la modification de cet article par la loi du 28 décembre 2015, la requalification du contrat d’assurance-vie en donation a toutefois perdu de son intérêt puisqu’un cas de récupération spécifique à l’assurance-vie a été créé. En effet, l’État ou le département peut exercer un recours contre le bénéficiaire du contrat d'assurance-vie à concurrence de la fraction des primes versées après l'âge de 70 ans. Cette récupération s’effectue à titre subsidiaire, c’est-à-dire si elle ne peut pas être effectuée contre la succession, le légataire ou le donataire du défunt qui avait perçu l’aide sociale. Lorsqu’elle concerne plusieurs bénéficiaires, la récupération s'effectue au prorata des sommes versées à chacun d’eux (CASF art. L 132-8, 4° créé par la loi 2015-1776 du 28-12-2015 art. 83).
Rémy FOSSET
Pour en savoir plus sur cette question, voir Mémento Successions Libéralités 2021 n° 79820
Suivez les dernières actualités en matière patrimoniale et assurez la relance d’activité pour vos clients ou votre entreprise avec Navis Patrimoine et famille :
Vous êtes abonné ? Accédez à votre Navis Patrimoine à distance.
Pas encore abonné ? Nous vous offrons un accès au fonds documentaire Navis Patrimoine pendant 10 jours.