1. Officiellement annoncé par un communiqué ministériel du 7 juin 2017 (voir la La Quotidienne du 8 juin 2017), le report d'un an du prélèvement à la source a été inscrit dans le projet de loid’habilitation déposé à l’Assemblée nationale le 29 juin et autorisant le Gouvernement à prendre par ordonnances diverses mesures de rénovation sociale (voir La Quotidienne du 10 juillet 2017).
L’entrée en vigueur du prélèvement décalée d’un an
2. L’article 9 du projet de loi d'habilitation autorise le Gouvernement à prendre toute mesure relevant du domaine de la loi permettant de décaler d’un an, au 1er janvier 2019, l’entrée en vigueur du prélèvement à la source et d’aménager en conséquence les années de référence des mesures transitoires qui l’accompagnent.
3. Logiquement, cet article autorise également le Gouvernement à décaler d’un an l’entrée en vigueur du versement de l’acompte de 30 % sur le montant des crédits d’impôts afférents aux frais de garde d’enfants et de services à la personne, initialement prévue au 1er janvier 2018. En effet, destinée à tempérer l’absence de prise en compte de ces crédits dans le taux du prélèvement à la source, le report de celui-ci prive cette mesure de toute pertinence en 2018. Les premiers acomptes de crédits d’impôt ne devraient donc être versés qu’en 2019 et au plus tard le 1er mars.
4. Par ailleurs, l’étude d’impact précise que les entrées en vigueur de certaines mesures qui peuvent être appliquées dès 2018 ne seront en revanche pas modifiées. Il s’agit notamment de celles de la généralisation de l’obligation de télédéclarer les salaires, les honoraires et les droits d’auteurs par leurs débiteurs, de la suppression de la retenue à la source optionnelle de 15 % prévue par l’article 182 C du CGI sur les droits d’auteurs et les revenus des artistes ou des sportifs ainsi que de la possibilité de modifier par décret le contenu de la déclaration sociale nominative (DSN), dont il est prévu qu’elle serve de support à la collecte du prélèvement à la source pratiqué sur les salaires et les revenus assimilés.
Le report des mesures de transition validé par le Conseil d’Etat
5. Dans son avis du 22 juin 2017, le Conseil d'Etat estime que le décalage du prélèvement et du crédit d'impôt modernisation du recouvrement (CIMR) ne porte atteinte à aucun principe constitutionnel. Il relève notamment que le CIMR ne constitue pas un dispositif accordant aux contribuables un avantage sous réserve de conditions mais une mesure ponctuelle uniquement destinée à éviter un double paiement l’année d’entrée en vigueur du prélèvement à la source, dont elle ne peut, par conséquent, être dissociée.
6. La Haute juridiction observe par ailleurs que, ayant été débattue au cours de la campagne en vue de l’élection présidentielle et finalement annoncée officiellement le 7 juin dernier, la décision de report n’était pas imprévisible et conclut qu’en tout état de cause les buts de sécurisation et de limitation des charges administratives poursuivis à cette occasion par le Gouvernement constituent des motifs d’intérêt général suffisants au regard des conséquences que sa décision pourrait avoir pour les contribuables ayant décidé de tirer parti des effets du CIMR.
Un éventuel remaniement du dispositif n’est pas à exclure
7. Le Gouvernement indique que sa décision de reporter la réforme ne vise qu’à assurer un meilleur accompagnement de sa mise en oeuvre tout en préservant ses objectifs et maintient au 1er janvier 2018 l’entrée en vigueur de certaines mesures qui y sont associées. De fait, ces éléments conduisent logiquement à considérer que le décalage de l’entrée en vigueur du prélèvement à la source devrait s’opérer à droit constant par rapport au dispositif initialement prévu par l’article 60 de la loi de finances pour 2017. Néanmoins, l’étude d’impact précise que ce décalage doit permettre de mener à bien l’expérimentation devant se dérouler de juillet à septembre auprès d’un panel représentatif de tiers collecteurs et, le cas échéant, d’en tirer les conséquences nécessaires avant que le prélèvement n’entre en vigueur. En effet, dans sa configuration actuelle, la réforme fait supporter aux entreprises la collecte de la retenue à la source pratiquée sur les salaires et les autres éléments de rémunération versés aux salariés.
Or, celles-ci ont d’ores et déjà manifesté certaines inquiétudes au sujet de la charge nouvelle qui leur est imposée et des conséquences que cette charge pourrait comporter en matière de compétitivité et de relations sociales. Ces inquiétudes ont été notamment relayées par un communiqué du 1er juin 2017 de la chambre de commerce et d’industrie de Paris qui préconise de remplacer les tiers collecteurs par la généralisation d’une formule modernisée de l’actuel prélèvement mensuel.
David KERSALE