Un couple procède à l’achat d’un appartement sur plan. L’opération est financée au moyen d’un emprunt bancaire. En raison de la liquidation judiciaire du vendeur, l’immeuble n’est pas achevé. Les acquéreurs assignent alors le mandataire judiciaire et la banque en résolution de la vente et du prêt.
La cour d’appel de Bordeaux prononce la résolution des deux contrats mais condamne aussi les acquéreurs à restituer à la banque la somme prêtée sans intérêts, déduction faite des échéances réglées. Pour les juges, le contrat de prêt souscrit pour l’acquisition est résolu de plein droit en raison de la résolution de la vente, de sorte que les parties doivent être remises dans le même état que si les contrats n’avaient jamais existé. Ces conventions ne créent pas des obligations de restitution indivisibles. Les acquéreurs sont donc tenus de rembourser le montant du prêt à la banque.
La Cour de cassation confirme la décision.
A noter : 1. En cas d’achat financé par un emprunt, les contrats de vente et de prêt sont interdépendants et forment un ensemble contractuel indivisible. Il en résulte notamment que la résolution du contrat de vente entraîne celle du prêt (pour une illustration, Cass. 1e civ. 7-4-1999 n° 97-15.728 P : RJDA 4/00 inf. 467). L’arrêt commenté le confirme. Cette indivisibilité comporte toutefois des limites : elle ne perdure pas dans le cadre de l’exécution des obligations de restitution consécutives à l’anéantissement de ces contrats. L’arrêt rapporté précise ainsi qu’une fois le contrat de prêt annulé, les acquéreurs doivent restituer au prêteur les sommes prêtées non encore remboursées même s’ils ne peuvent pas récupérer le prix de la vente annulée en raison de l’insolvabilité du vendeur.
2. La solution a été rendue sous l’empire du droit antérieur à la réforme du droit des contrats (Ord. 2016-131 du 10-2-2016). Désormais, le nouvel article 1186 alinéa 2 du Code civil prévoit expressément l’interdépendance des contrats lorsque ceux-ci ont été conclus en vue d’une opération d’ensemble et que la disparition de l’un d’eux rend impossible ou sans intérêt l’exécution de l’autre. L’extinction du contrat subséquent se traduit par sa caducité, laquelle n’interviendra toutefois que si celui contre lequel elle est invoquée connaissait l’existence de l’opération d’ensemble lorsqu’il a donné son consentement (C. civ. art. 1186, al. 3). Reste à savoir si la vente immobilière financée à crédit relève ou non de ces nouvelles dispositions. Si tel était le cas, la solution de l’arrêt rapporté ne serait pas bouleversée. Bien que différente de la résolution en ce qu’elle sanctionne un événement postérieur à la conclusion du contrat et qu’elle l’éteint pour l’avenir sans remettre le passé en cause, la caducité peut donner lieu à restitution dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9 du Code civil (C. civ. art. 1187).
Florence GALL-KIESMANN
Pour en savoir plus : voir Mémento Vente immobilière n° 42666