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Non-respect de la priorité de réembauche par l’employeur : quel délai de prescription ?

L'action du salarié fondée sur le non-respect par l'employeur de la priorité de réembauche après un licenciement économique se prescrit par deux ans à compter de l’expiration du délai d’un an suivant la rupture du contrat de travail.

Cass. soc. 1-2-2023 n° 21-12.485 FS-B, Sté Aquilab c/ B.


Par Patrick SAGET
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©Gettyimages

Tout salarié licencié pour motif économique bénéficie d’une priorité de réembauche durant un délai d’un an à compter de la date de rupture de son contrat de travail s’il en fait la demande au cours de ce même délai. Dans ce cas, l’employeur doit informer le salarié de tout emploi devenu disponible et compatible avec sa qualification (C. trav. art. L 1233-45).

En cas de manquement de l’employeur à cette obligation, le salarié peut engager une action devant le conseil de prud’hommes en vue d’obtenir une indemnité dont le montant ne peut pas être inférieur à un mois de salaire s'il a au moins 2 ans d'ancienneté et si l'entreprise compte au moins 11 salariés ou, dans le cas contraire, la réparation du préjudice subi, dont le juge apprécie souverainement l'existence et l'étendue (C. trav. art. L 1235-13 et L 1235-14).

Quel est le délai de prescription d’une telle action ? Quel est son point de départ ? Telles sont les questions auxquelles la chambre sociale de la Cour de cassation répond dans un arrêt du 1er février 2023.

A noter :

Devant le juge, l'employeur doit apporter la preuve qu'il a satisfait à son obligation en établissant avoir proposé les postes disponibles ou en justifiant de l'absence de tels postes (Cass. soc. 24-9-2008 n° 07-40.264 F-D), par exemple en produisant le registre du personnel (Cass. soc. 23-6-2009 n° 07-44.640 FS-PB).

Un recours exercé plus d’un an après avoir adhéré à un CSP

En l’espèce, une salariée, engagée en qualité d’ingénieur, avait été convoquée à un entretien préalable à son licenciement pour motif économique, fixé au 23 juillet 2014, au cours duquel il lui avait été proposé d’adhérer à un contrat de sécurisation professionnelle (CSP). Après avoir adhéré à ce dispositif, le 7 août 2014, elle avait demandé, le 13 août, à bénéficier de la priorité de réembauche. Estimant que l’employeur avait violé son obligation de réembauche en ne lui proposant pas un emploi d’ingénieur développement devenu disponible, l’intéressée avait engagé une action judiciaire, le 19 janvier 2016, et obtenu des dommages-intérêts à ce titre.

Cette décision était contestée par l’employeur, celui-ci soutenant que cette action, formée plus d’un an après l’adhésion au CSP, était prescrite. En vain, tant la cour d’appel que la Cour de cassation ayant rejeté ses arguments.

L’action relève de la prescription afférente à l’exécution du contrat

Se posait donc la question du délai de prescription applicable.

Pour soutenir que l’action était prescrite, l’employeur se fondait sur l’article L 1233-7 du Code du travail, prévoyant un délai de prescription de 12 mois pour toute contestation portant sur un licenciement économique, et surtout sur l'article L 1233-67, propre au CSP, qui prévoit également que toute contestation portant sur la rupture ou son motif se prescrit par 12 mois à compter de l'adhésion au CSP.

Mais la chambre sociale fait une tout autre analyse. Elle considère, en effet, que l’action fondée sur le non-respect par l’employeur de la priorité de réembauche est, non pas liée à la contestation de la rupture du contrat résultant de l’adhésion au CSP, mais à l’exécution du contrat de travail et que, en conséquence, elle relève de la prescription biennale prévue à l’article L 1471-1 du Code du travail.

A noter :

La solution est prise sous l’empire de l’article L 1471-1 du Code du travail dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017 qui soumettait à la prescription biennale toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail. Si, depuis cette ordonnance, l’article précité fixe un délai de prescription de 12 mois pour les contestations relatives à toute rupture du contrat de travail, il soumet toujours à la prescription biennale les actions sur l’exécution du contrat. Par conséquent, la solution retenue garde aujourd’hui tout son intérêt.

La solution retenue par la Haute Cour est, selon nous, transposable à l’action fondée sur le non-respect par l’employeur de la priorité de réembauche dont bénéficient les salariés ayant démissionné après un congé de maternité ou d’adoption en vertu de l’article L 1225-67 du Code du travail.

La prescription court à compter de la fin de la priorité de réembauche

La chambre sociale précise également que l’indemnisation du salarié dépend des conditions dans lesquelles l’employeur a exécuté son obligation de réembauche. Elle en déduit que le délai de prescription de deux ans commence à courir à la date à laquelle la priorité de réembauche a cessé, c’est-à-dire à partir de l’expiration du délai d’un an à compter de la rupture du contrat de travail.

En l’espèce, la salariée ayant saisi la juridiction prud’homale moins de deux ans après la cessation de la priorité de réembauche, son action n’était pas prescrite.

En revanche, sa demande d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, présentée dans la même instance, donc plus d’un an après l’adhésion de la salariée au CSP, a été jugée par la Haute Cour irrecevable car prescrite en application de l’article L 1233-67 précité.

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Cass. soc. 1-2-2023 n° 21-12.485 FS-B, Sté Aquilab c/ B.

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