Rappel des règles
La CC.
Elle s’applique automatiquement aux salariés : ils ont droit aux avantages qu’elle prévoit, même s’ils ne sont pas repris expressément dans les contrats de travail.
Le contrat de travail.
C’est la règle applicable entre salarié et employeur, si les éléments qu’il prévoit sont au moins aussi favorables que la CC.
En pratique.
Ainsi, même si le contrat ne renvoie pas à la CC, lorsqu’elle est modifiée en faveur des salariés, les avantages qu’elle octroie leur sont applicables même si le contrat n’est pas modifié.
Les faits
Dans cette entreprise, le système de rémunération prévoyait une prime annuelle et une prime de production, cette dernière étant considérée comme contractualisée. L’employeur supprime la prime de production par courrier en 1999, et en 2010, une prime d’assiduité est mise en place. Un salarié demandant un rappel de prime de production, l’employeur réclame alors le remboursement de la prime d’assiduité, estimant qu’elles ont le même objet et que le salarié ne peut les cumuler.
La solution sur le cumul
Le principe.
En cas de concours entre les règles contractuelles et les dispositions conventionnelles, les avantages ayant le même objet ou la même cause ne peuvent, sauf stipulations contraires, se cumuler, le plus favorable d’entre eux pouvant seul être accordé (Cass. soc. 11‑5‑2022 n° 21‑11.240) . Cette solution n’est pas nouvelle, étant précisé que l’identité d’objet ou de cause sont alternatives et non cumulatives.
L’appréciation.
En présence de 2 primes liées à la présence du salarié à son poste, l’un des intérêts concrets de cet arrêt est l’insuffisance des arguments des juges d’appel pour considérer que les primes n’avaient pas le même objet et pouvaient donc se cumuler, sachant que pour eux :
la prime de production était une prime forfaitaire journalière basée sur la présence du salarié à son poste de travail, attribuée à tous les salariés de plus de 1 an d’ancienneté, dont le montant dépendait du niveau et de l’échelon ainsi que de la gratification annuelle, et pouvait varier en fonction de la valeur du salarié, appréciée par le responsable d’exploitation selon certains critères ;
alors que la prime d’assiduité était fondée sur la seule présence du salarié à son poste et ne pouvait donc se substituer à la prime de production.
Conseil.
En cas de changement de structure de rémunération, il est donc important de bien évaluer les différentes conditions propres au versement des éléments en cause, afin de limiter les risques que les avantages soient considérés comme de nature et/ou d’objet différents.
Des exemples
On peut noter par exemple les solutions suivantes :
non cumulables car ayant le même objet : une prime d’incommodité de prise des repas, appelée « prime de panier », et une prime de panier payée à compter de l’extension de la CC du bâtiment (Cass. soc. 19‑7‑1988 n° 86‑43.353) ;
pouvant se cumuler car n’ayant pas la même cause : une prime d’objectif et de régularité contractuelle récompensant le travail effectué par le salarié, une prime exceptionnelle conventionnelle fonction de l’ancienneté des salariés, et une prime conventionnelle de pondération calculée en tenant compte de la présence des salariés sur le lieu de travail (Cass. soc. 11‑4‑2018 n° 16‑50.016) ;
pouvant se cumuler car n’ayant pas le même objet : un 13e mois contractuel constituant le paiement du salaire annuel en 13 fois, et une « gratification du 13e mois » conventionnelle répondant à des conditions propres d’ouverture et de règlement (Cass. soc. 13‑6‑2012 n° 10‑27.395) ;
pouvant se cumuler car n’ayant pas le même objet : une somme de 100 € mensuels contractuels en cas d’atteinte du niveau d’allemand « courant et professionnel » et une prime de langue conventionnelle au bénéfice des salariés « amenés, à la demande de l’employeur, à utiliser de façon permanente d’autres langues étrangères » (Cass. soc. 21‑3‑2018 n° 16‑21.021) .
Sous réserve de dispositions contraires.
L’arrêt réserve le cas de dispositions contraires : en effet, le contrat de travail peut prévoir expressément que 2 avantages de même nature se cumulent, auquel cas l’employeur doit appliquer cette règle. C’est ce qui a été jugé par exemple pour un salarié licencié sans cause réelle et sérieuse, dont le contrat de travail prévoyait, en cas de rupture du contrat de travail sans faute lourde ou grave, une indemnité s’ajoutant à l’IL conventionnelle de licenciement. (Cass. soc. 6‑6‑2007 n° 05‑43.055).