Pour autoriser le licenciement pour faute d'un salarié protégé, l'inspecteur du travail doit rechercher si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement, compte tenu des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi.
Dans cet arrêt du 7 octobre 2022, le Conseil d'État se prononce sur le cas d'un salarié protégé cadre ayant proféré à plusieurs reprises des propos racistes et sexistes envers plusieurs de ses subordonnées.
Des propos seulement brutaux, maladroits et déplacés ?
Dans cette affaire, un salarié protégé chef de service prononçait de manière répétée, à l'encontre de trois salariées de son service, des propos faisant explicitement référence, d'une part, au sexe de ces salariées et, d'autre part, à leur origine et à leur religion supposées. La cour administrative d’appel avait qualifié ces propos de « brutaux ou maladroits », « déplacés et sexistes » et « présentant un caractère blessant pour leurs destinataires ». Mais, elle avait pris en compte l'existence de tensions entre le salarié protégé et son employeur et l'absence d'antécédents disciplinaires, pour estimer qu'ils ne constituaient pas une faute d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement.
A noter :
L’inspecteur du travail doit en effet prendre en compte les tensions dans l'entreprise, l'ancienneté et les antécédents disciplinaires des salariés en cause dans l’appréciation de la faute pour justifier ou non le licenciement du salarié protégé (Guide DGT sur le licenciement des salariés protégés de sept. 2019, fiche 6).
Pas de minimisation des propos racistes et sexistes
Le Conseil d'État censure l'analyse des juges du fond. Pour lui, les propos tenus par le salarié visaient systématiquement et de manière répétée des salariées ayant pour point commun d'être des femmes, supposément d'origine maghrébine et de confession musulmane, et, au surplus, se trouvant sous sa responsabilité, et ne pouvaient, dès lors qu'ils revêtent un caractère raciste pour certains, et sexiste pour d'autres, être réduits à des propos triviaux. Ils sont donc d'une gravité suffisante de nature à justifier le licenciement disciplinaire du salarié protégé.
A noter :
Le Conseil d'État a déjà jugé que des propos racistes ou sexistes étaient d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement d'un salarié protégé (CE 10-7-1995 n° 133802 ; CE 24-11-2006 n° 282374). Cette décision du 7 octobre 2022, mentionnée aux Tables du recueil Lebon, invite les juges du fond à ne pas minimiser la gravité des propos sexistes ou racistes.
Retrouvez toute l'actualité sociale décryptée et commentée par la rédaction Lefebvre Dalloz dans votre Navis Social.
Vous êtes abonné ? Accédez à votre Navis Social à distance.
Pas encore abonné ? Nous vous offrons un accès au fonds documentaire Navis Social pendant 10 jours.
Documents et liens associés