Les obligations sont des titres négociables qui, dans une même émission, confèrent un droit de créance pour une même valeur nominale (C. mon. fin. art. L 231-5), ce qui en fait aussi des valeurs mobilières (C. com. art. L 228-1). Une SARL peut émettre des obligations si elle a désigné un commissaire aux comptes et si ses comptes des trois derniers exercices de 12 mois ont été régulièrement approuvés par les associés (C. com. art. L 223-11, al. 1). Ces titres sont soumis au régime applicables aux obligations émises par les sociétés par actions à l'exception de certaines règles (C. com. art. L 223-11, al. 2).
Les sociétés par actions peuvent émettre des obligations convertibles en actions permettant à leur titulaire d'opter à terme entre un remboursement de sa créance en espèces et un remboursement en actions. Ces obligations « composées » sont soumises à un régime autonome de celui des obligations « simples » (C. com. art. L 228-91 s.). Aucune disposition ne prévoit cette possibilité pour les SARL et l'émission de toute valeur mobilière autre que celle visée à l'article L 223-11 du Code de commerce est interdite sous peine de sanctions pénales à l'encontre des gérants (C. com. art. L 241-2).
Les SARL peuvent-elles émettre des obligations convertibles en parts sociales ?
Oui, répond l'Association nationale des sociétés par actions (Communication Ansa, comité juridique n° 23-013 du 1-3-2023), pour qui les associés d'une SARL peuvent autoriser une telle émission.
Et comment s'opère la conversion des obligations ?
La libération des parts sociales s'effectue, précise l'Ansa, par compensation entre la créance de l'obligataire sur la société et sa dette d'apport dans les conditions de l'article 1347 du Code civil. L'absence de dispositions dans le Code de commerce prévoyant expressément la possibilité de libérer des parts sociales par compensation de créance ne doit pas être interprétée comme l'interdisant. L'Ansa recommande cependant que les statuts prévoient ce mode de libération des parts sociales.
A noter :
1° La Compagnie nationale des commissaires aux comptes s'était déjà prononcée en faveur de la possibilité pour une SARL d'émettre des obligations convertibles en parts sociales (Bull. CNCC décembre 2017 p. 543). L'Ansa se rallie à cette position sans motiver sa réponse au regard de l'interdiction énoncée à l'article L 241-2 du Code de commerce. On peut soutenir que les obligations convertibles en parts sociales ne se distinguent pas des obligations « simples » autorisées par l'article L 223-11 du Code de commerce, en se fondant sur la jurisprudence rendue à propos d'obligations remboursables en actions selon laquelle, jusqu'à leur remboursement en actions, les titres sont soumis au régime des obligations « simples » (Cass. com. 13-6-1995 n° 94-21.003 P : RJDA 7/95 n° 856).
2° L'Ansa apporte surtout des précisions sur la réalisation de l'augmentation de capital consécutive à la conversion des obligations en parts sociales en indiquant que la libération des parts a lieu par compensation entre la créance représentée par le titre obligataire et la créance de la société au titre de l'apport résultant de la conversion des parts. Pour rappel, la compensation de créance est l'extinction simultanée d'obligations réciproques entre deux personnes (C. civ. art. 1347). Cette compensation ne peut avoir lieu qu'entre créances fongibles, certaines, liquides et exigibles (C. civ. art. 1347-1). Contrairement aux dispositions applicables aux sociétés anonymes (C. com. art. L 225-128, al. 2), aucun texte ne prévoit la libération des parts de SARL par compensation. Toutefois, la jurisprudence a depuis longtemps admis cette modalité de libération à propos d'augmentation de capital classique (Cass. com. 7-2-1972 : Rev. sociétés 1973 p. 297 note E. du Pontavice ; CA Versailles 25-10-1990 : Bull. Joly 1991 p. 76 note M. Jeantin). Certaines décisions imposent néanmoins que le paiement par compensation soit expressément prévu par les statuts (CA Paris 10-3-1988 : BRDA 13/88 p. 6), tandis que d'autres autorisent ce mode de libération des actions à moins que les statuts ou les associés ne l'aient expressément écarté (CA Aix 3-3-2022 n° 19/01925 : RJDA 7/22 n° 415).
Au-delà de la libération des parts, la réalisation de l'augmentation de capital se heurte à des difficultés pratiques, notamment en raison de l'impossibilité pour les SARL de se prévaloir du régime de formalités simplifiées applicable aux valeurs mobilières donnant accès au capital émises par les sociétés par actions. Par exemple, à chaque conversion d'obligations en parts sociales, la réalisation de l'augmentation de capital corrélative doit être constatée par une décision collective des associés, alors que, dans les sociétés anonymes, cette formalité est confiée au conseil d'administration ou au directoire, lesquels peuvent déléguer ce pouvoir au président, à un membre du directoire, au directeur général ou au directeur général délégué (C. com. art. L 225-149, al. 3 et 4).