Un particulier achète des lots dans un immeuble en cours de rénovation. Le programme a pour objet de réaliser une résidence hôtelière qui doit permettre à ses acquéreurs une opération de défiscalisation en recourant à la location meublée professionnelle. Le chantier est finalement abandonné. Le vendeur et le maître d’œuvre sont mis en redressement puis en liquidation judiciaires. L’acheteur assigne en responsabilité les notaires ayant concouru à la vente. Selon lui, les officiers publics ont failli à leur obligation de conseil pour s’être abstenu de lui proposer une réitération de la vente sous le régime protecteur de la vente en l’état futur d’achèvement (CCH art. L 261-10).
La cour d’appel reconnaît les notaires responsables d’une perte de chance subie par l’acheteur. Constatant que le contrat préliminaire de réservation mentionnait la vente d’un deux-pièces en duplex avec mise en place d’une copropriété et que l’acte authentique visait un usage d’habitation, elle en déduit que le régime de la vente en l’état futur d’achèvement du secteur protégé devait s’appliquer. Peu importent les modalités de gestion en résidence hôtelière de ce bien ou de l’immeuble dont il dépend.
La Cour de cassation confirme.
A noter : Pour qu’une vente relève du secteur protégé de la vente d’immeuble à construire, deux conditions cumulatives doivent être réunies. Le contrat doit (CCH art. L 261-10, al. 1):
- avoir pour objet le transfert de propriété d’un immeuble ou d’une partie d’immeuble à usage d’habitation ou à usage professionnel et d’habitation ;
- comporter l’obligation pour l’acheteur d’effectuer des versements avant l’achèvement de la construction.
S’agissant de la condition d’usage d’habitation, la Cour de cassation a déjà eu l’occasion de juger que la vente d’un immeuble en restructuration destiné à devenir une résidence avec services pour personnes âgées relève du secteur protégé dès lors que les acheteurs règlent le prix avant l’achèvement et que les lots vendus sont destinés à être habités à l’année par des personnes âgées ; peu importe que ces lots doivent être loués par bail commercial et exploités commercialement par le biais de locations meublées avec services (Cass. 3e civ. 7-1-2016 n° 14-29.655 FS-PB : BPIM 1/16 inf. 29, RDI 2016 p. 150 obs. J.-P. Tricoire et O. Tournafond).
Par la décision rapportée, la Cour de cassation semble confirmer cette appréciation objective de la destination de l’immeuble, faisant fi des modalités de gestion des lots achetés. Corrélativement, cette position paraît mettre fin à l’incertitude née d’une précédente décision non publiée, par laquelle les Hauts Magistrats confirmaient l’arrêt d’une cour d’appel qui avait écarté du secteur protégé de la Vefa une opération de transformation d’un immeuble en résidence hôtelière, de sorte que la solution dégagée début 2016 pour les résidences services pouvait sembler ne pas être transposable au cas des résidences hôtelières (Cass. 3e civ. 7-4-2016 n° 15-11.342 F-D : Gaz. Pal. 26-7-2016 p. 70 obs. critiques V. Zalewski-Sicard).
Signalons enfin qu’au cas particulier, le régime de la vente d’immeuble à rénover n’était pas susceptible de s’appliquer car il n’était pas encore en vigueur (Décret 2008-1338 du 16-12-2008 ; CCH art. R 262-1 s.).
Florence GALL-KIESMANN
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Urbanisme Construction n° 76085