Procédure pénale
Recevabilité des citations directes en l'absence de justificatifs de ressources
Au terme d’une application littérale de l’article 392-1 du code de procédure pénale, la chambre criminelle indique que contrairement à la citation délivrée à la requête d'une personne morale à but lucratif, celle délivrée à la requête d'une personne physique non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle ne peut être déclarée irrecevable au seul motif que cette dernière n'a pas produit de justificatifs permettant de déterminer le montant de la consignation. Dans ce cas, il appartient au tribunal correctionnel de fixer ce montant au regard des éléments de procédure et des éventuelles pièces produites. (Crim. 19-03-2024, n° 23-81.792 F-B)
Cassation : formalisme du dépôt du mémoire
Il résulte de l'article 584 du code de procédure pénale que le demandeur en cassation, non condamné pénalement, doit déposer son mémoire au greffe de la juridiction qui a rendu la décision attaquée. Le mémoire adressé par courrier est irrecevable et ne saisit pas la Cour de cassation des moyens qu'il contient, à moins que le demandeur justifie s'être trouvé, en raison d'une circonstance indépendante de sa volonté, dans l'impossibilité absolue de se conformer aux exigences dudit article. (Crim. 19-03-2024, n° 23-85.748 F-B)
Peine et exécution des peines
Enfants victimes et covictimes de violences intrafamiliales
La loi du 18 mars 2024 visant à mieux protéger et accompagner les enfants victimes et covictimes de violences intrafamiliales, publiée au journal officiel du 19 mars, renforce le principe du retrait de l’autorité parentale en cas de crime ou d’inceste. Plus précisément, selon le nouvel article 228-1 du code pénal, en cas de condamnation d'un parent comme auteur, coauteur ou complice, soit d'un crime ou d'une agression sexuelle incestueuse commis sur son enfant, soit d'un crime commis sur la personne de l'autre parent, la juridiction de jugement devra désormais ordonner le retrait total de l'autorité parentale, sauf décision contraire spécialement motivée. Si elle ne décide pas le retrait total de l'autorité parentale, elle devra ordonner le retrait partiel de l'autorité parentale ou le retrait de l'exercice de l'autorité parentale, sauf décision contraire spécialement motivée.
Par ailleurs, l'exercice de l'autorité parentale et les droits de visite et d'hébergement d’un parent poursuivi ou mis en examen soit pour un crime commis sur l'autre parent, soit pour une agression sexuelle incestueuse ou pour un crime commis sur son enfant seront suspendus de plein droit jusqu'à la décision du juge aux affaires familiales, de non-lieu du juge d'instruction ou jusqu'à la décision de la juridiction pénale (C. civ., nouvel art. 378-2). (L. n° 2024-233 du 18-03-2024)
Retrait de crédit de réduction de peine : précisions sur l’appel
Le principe selon lequel la cour d'appel ne peut, sur le seul appel du prévenu, aggraver le sort de l'appelant (C. pr. pén., art. 515) s’applique en matière de crédit de réduction de peine. Ainsi, les dispositions réglementaires de l'article D. 49-41-2 du code de procédure pénale qui permettent au président de la chambre de l'application des peines, sur le seul appel du condamné et sur réquisitions du procureur général, d'ordonner un retrait de crédit de réduction de peine d'une durée plus importante que celle fixée par le juge de l'application des peines, ne peuvent l'autoriser à déroger à la règle, de nature législative, de l'interdiction d'aggraver le sort de l'appelant sur son seul appel.
Par ailleurs, les dispositions de l'article 712-12 du code de procédure pénale ne prévoient pas la communication au condamné des observations du ministère public à l'occasion d'un appel formé contre une ordonnance portant sur un retrait de crédit de réduction de peine. (Crim. 20-03-2024, n° 23-84.012 F-B)
Suivi socio-judiciaire et injonction de soins : revirement de jurisprudence quant aux avertissements à destination du condamné
« Les articles 131-36-1 et 131-36-4 du code pénal ne prévoient pas que la délivrance des avertissements qu'ils prescrivent s'impose à peine de nullité de la décision sur la peine ». C’est ce que retient désormais la chambre criminelle, à rebours du principe qu’elle appliquait jusque-là.
Pour rappel, le premier de ces textes dispose que dans le cas où un suivi socio-judiciaire est ordonné, le président de la juridiction avertit le condamné des obligations qui lui incombent et des conséquences qu'entraînerait leur inobservation. De même, en vertu du second, lorsque la juridiction de jugement soumet ce condamné à une injonction de soins, le président de la juridiction l’avertit qu'aucun traitement ne pourra être entrepris sans son consentement, mais que, s’il refuse les soins qui lui seront proposés, l'emprisonnement prévu en application de l'article 131-36-1 pourra être mis à exécution.
La chambre criminelle exclut donc la nullité en la matière, soulignant que la mise en œuvre du suivi socio-judiciaire et de l'injonction de soins, sous le contrôle du juge de l'application des peines, est évoquée par d’autres dispositions légales, à savoir les articles 763-1 à 763-9 et R. 61 à R. 61-6 du code de procédure pénale. (Crim. 20-03-2024, n° 23-80.886 FS-B)
Sécurité intérieure
Création de fichiers pour traiter des images de caméras embarquées.
La création de fichiers destinés à traiter des images issues des enregistrements provenant de caméras embarquées à bord des véhicules est autorisée pour les services et unités de la police nationale, de la gendarmerie nationale, des douanes, les services d'incendie et de secours ainsi que pour les services de l'Etat et les unités militaires investis à titre permanent de missions de sécurité civile. Les finalités du fichier, les données enregistrées, les modalités et la durée de conservation des informations ainsi que les conditions d’accès sont précisées. (Décr. n° 2024-238 du 18-03-2024 portant application des articles L. 243-1 et suivants du code de la sécurité intérieure et autorisant la mise en œuvre de traitements d'images au moyen de caméras embarquées dans les véhicules, embarcations et autres moyens de transport des forces de sécurité intérieure et des acteurs de la sécurité civile).
Consultation des fichiers de police par le renseignement
La liste des services de renseignements autorisés à consulter les fichiers de police pour les seuls besoins liés à la protection des intérêts fondamentaux de la nation est modifiée. (Décr. n° 2024-237 du 18-03-2024 modifiant l'article R. 234-3 du code de la sécurité intérieure)
Pour aller plus loin : voir la revue AJ pénal