Embauche
- Une cour d'appel ne saurait requalifier la relation contractuelle entre des gérants de magasins et la société de distribution en un contrat de travail en se fondant uniquement sur des motifs tirés de la brièveté et de la multiplicité des remplacements ainsi que de contraintes inhérentes aux conditions d'exploitation des magasins concernés, qui ne permettent pas à eux seuls de caractériser l'existence d'un lien de subordination juridique (Cass. soc. 10-10-2018 n° 16-26.497 FS-PB).
- En cas de litige sur le motif de recours au travail temporaire, il incombe à l'entreprise utilisatrice de rapporter la preuve de la réalité du motif énoncé dans le contrat (Cass. soc. 10-10-2018 n° 16-26.535 F-D).
Exécution du contrat
- Une succession de CDD, sans délai de carence, n'est licite, pour un même salarié et un même poste, que si chacun des contrats a été conclu pour l'un des motifs prévus limitativement par l'article L 1244-4 du Code du travail. Une cour d’appel ne saurait donc rejeter la demande de requalification de CDD en CDI alors qu’elle a constaté que le premier CDD avait été conclu entre les parties en raison d’un accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise, soit pour un motif non prévu par le texte précité, de sorte qu’un délai de carence devait être observé avant la conclusion du second CDD pour remplacement d’un salarié (Cass. soc. 10-10-2018 n° 17-18.294 FS-PB).
Paie
- En prévoyant que ce n’est que pour une durée relativement sans importance que l’employeur est tenu de maintenir le salaire pendant la suspension du contrat de travail pour une cause personnelle indépendante de la volonté du salarié, les dispositions de l’article L 1226-3 du Code du travail, telles qu’interprétées par la Cour de cassation, ne portent pas une atteinte disproportionnée à la liberté d’entreprendre (Cass. soc. QPC n° 18-13.995 FS-PB).
Durée du travail
- Une cour d’appel ne saurait appliquer le forfait annuel de 258 jours prévu par l'article L 433-1 du CASF pour les permanents responsables et les assistants permanents exerçant au sein des lieux de vie et d'accueil alors que le droit à la santé et au repos est au nombre des exigences constitutionnelles et qu'elle avait constaté que le décret d'application auquel renvoie le texte précité pour la détermination des modalités de suivi de l'organisation du travail des salariés concernés, nécessaire à la garantie du droit à la santé et au repos par une amplitude et une charge de travail raisonnables assurant une bonne répartition dans le temps du travail du salarié, n'était pas intervenu à la date d'exécution de la prestation de travail (Cass. soc. 10-10-2018 n° 17-10.248 FS-PB).
Rupture du contrat
- La transaction conclue en l'absence de notification préalable du licenciement par lettre recommandée avec demande d'avis de réception est nulle (Cass. soc. 10-10-2018 n° 17-10.066 FS-PB).
- Dès lors que la résiliation judiciaire du contrat de travail est prononcée aux torts de l'employeur, l'indemnité de préavis est due même si le salarié, physiquement inapte à son emploi, est dans l'incapacité d'exécuter une période de travail (Cass. soc. 10-10-2018 n° 17-23.650 F-D).
Congés
- En l'absence de dérogation conventionnelle, le droit à des jours de congés supplémentaires naît du seul fait du fractionnement du congé payé principal, que ce soit l'employeur ou le salarié qui en ait pris l'initiative. Un salarié ne saurait être débouté de sa demande d'attribution de jours de fractionnement au motif qu'il ne démontre pas avoir fractionné son congé principal à la demande de l'employeur alors que les dispositions de la convention collective Syntec ne dérogent pas au Code du travail en ce qui concerne les droits des salariés à des jours de congés supplémentaires (Cass. soc. 10-10-2018 n° 17-17.890 FS-PB).
- Lorsque le salarié s'est trouvé dans l'impossibilité de prendre sescongés payés annuels en raison d'absences liées à une maladie, un accident du travail ou une maladie professionnelle, les congés payés acquis doivent être reportés après la date de reprise du travail ou, en cas de rupture, être indemnisés (Cass. soc. 10-10-2018 n° 17-23.650 F-D).
Santé et sécurité
- Si la juridiction prud'homale est seule compétente pour statuer sur le bien fondé de la rupture du contrat de travail, relève, en revanche, de la compétence exclusive du tribunal des affaires de sécurité sociale l'indemnisation des dommages résultant d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, qu'ils soient ou non la conséquence d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité. Dès lors que, sous le couvert de demandes indemnitaires fondées sur le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, le salarié, sans contester le bien fondé de la rupture, demandait en réalité la réparation par l'employeur d'un préjudice né de sa maladie professionnelle, de telles demandes ne pouvaient être formées que devant la juridiction de la sécurité sociale (Cass. soc. 10-10-2018 n° 17-11.019 FS-PB).
- La faute inexcusable de l'employeur est présumée établie pour les salariés titulaires d'un CDD, les salariés temporaires et les stagiaires en entreprise victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle affectés à des postes de travail présentant des risques particuliers pour leur santé ou leur sécurité qui n’ont pas bénéficié de la formation à la sécurité renforcée. Dès lors qu’une salariée d’une entreprise de travail temporaire a été mise à disposition d’une société à un poste de travail présentant des risques particuliers pour la santé et la sécurité et que cette société ne justifie pas lui avoir dispensé une formation renforcée à la sécurité, la présomption de faute inexcusable ne peut être écartée (Cass. 2e civ. 11-10-2018 n° 17-23.694 F-PB).
- Une cour d'appel ne saurait débouter des facteurs de la Poste de leur demande de rémunération au titre de la journée au cours de laquelle ils ont exercé leur droit de retrait alors qu'elle constate que le secrétaire du CHSCT avait exercé son droit d'alerte pour un danger grave et imminent auquel serait exposé l'ensemble du personnel « facteurs » de l'établissement, qu'il avait informé l'employeur dans la fiche de signalement de l'exercice du droit de retrait par les intéressés, rappelé avoir alerté les membres du CHSCT sur les risques psychosociaux dans l'établissement depuis plusieurs mois sans qu'aucune mesure corrective ne soit prise et conclu « les facteurs sont au bord de la rupture, les risques psychosociaux sont avérés, les facteurs ne reprendront pas le travail ce jour sans mesure corrective de votre part » et, qu'à la suite de ce signalement, l'employeur avait pris des mesures correctives dès le lendemain (Cass. soc. 10-10-2018 n° 17-19.541 FS-D).
- La chose définitivement jugée au pénal s'imposant au juge civil, l'employeur définitivement condamné pour un homicide involontaire commis, dans le cadre du travail, sur la personne de son salarié et dont la faute inexcusable est recherchée, doit être considéré comme ayant eu conscience du danger auquel celui ci était exposé et n'avoir pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver (Cass. 2e civ. 11-10-2018 n° 17-18.712 F-PB).
Statuts particuliers
- Les dispositions du Code du travail bénéficiant aux salariés s'appliquent en principe aux gérants non-salariés de succursales de commerce de détail alimentaire. Selon de l'article L 7322-1 du Code du travail, l'entreprise propriétaire de la succursale est responsable au profit des gérants non-salariés des dispositions du Code relatives à la durée du travail, aux repos et congés payés et à la sécurité du travail lorsque les conditions de travail, de santé et de sécurité au travail dans l'établissement ont été fixées par elles et soumises à son accord. Il en résulte que lorsque, les conditions d'application en sont réunies, les gérants non-salariés peuvent revendiquer le paiement d'heures supplémentaires et l'application des dispositions relatives à la charge de la preuve de l’existence et du nombre d’heures de travail accomplies (Cass. soc. 10-10-2018 n° 17-13.418 FS-PB).