Un salarié, engagé en qualité de président du directoire, a conclu une transaction avec son employeur. Ce dernier a versé une somme de 1 245 000 € comprenant 895 833 € d’indemnité conventionnelle de licenciement et 349 667 € d’indemnité transactionnelle.
Une erreur de calcul de l’employeur avec des conséquences fiscales…
Toutefois, l’employeur a commis une erreur dans le calcul du montant de l’indemnité conventionnelle de licenciement, ce qui a entraîné un redressement fiscal du salarié. En effet, l’indemnité conventionnelle de licenciement, exonérée d’impôt, s’élevait en réalité à 446 950 €, et l’administration fiscale a donc considéré que l’indemnité transactionnelle soumise à l’impôt s’élevait à 798 550 €, et non à 349 667 € comme stipulé par le protocole transactionnel. Le salarié a, en conséquence, saisi la juridiction prud’homale d’une demande de dommages-intérêts à la suite de ce redressement.
… neutralisée par la rédaction du protocole transactionnel
La transaction précise que le salarié « déclare expressément qu’il fera son affaire personnelle de toutes déclarations des sommes qui lui seront versées à l’occasion de la rupture de son contrat de travail et notamment des sommes susceptibles d’être imposables au titre de l’impôt sur le revenu » et déclare qu’il est rempli de tous ses droits et n’a plus aucune réclamation à formuler à l’encontre de l’employeur et renonce irrévocablement à toutes demandes et actions de toutes natures liées à ses fonctions et mandats, à son contrat de travail et à toutes réclamations de tout avantage en nature ou argent ainsi que toutes demandes, sommes, indemnités et dommages et intérêts de toute nature pour quelque cause que ce soit.
Pour la cour d’appel, l’action du salarié ne tend qu’à remettre en cause la transaction, alors que celle-ci a été exécutée par l’employeur et que le salarié a expressément accepté de « faire son affaire personnelle » de l’imposition des sommes perçues. Ainsi, il a donc admis supporter les conséquences fiscales des sommes acceptées et reçues et ne peut rechercher la responsabilité contractuelle et délictuelle de son cocontractant à ce titre. Les juges du fond en déduisent que la demande du salarié se heurte donc à l’autorité de chose jugée attachée à la transaction, de sorte qu’elle est irrecevable.
La Cour de cassation approuve la décision des juges du fond. Pour elle, la cour d’appel, qui a constaté que l’employeur avait versé au salarié les sommes mentionnées dans la transaction, en a ainsi caractérisé l’exécution par l’employeur.
Après avoir rappelé les termes de la transaction, la Cour en conclut que l’employeur pouvait opposer la transaction au salarié et que la demande indemnitaire, formée à l’encontre de l’employeur résultant du redressement fiscal dont le salarié avait fait l’objet à la suite de la déclaration des sommes versées en exécution de la transaction, n’était pas recevable.
A notre avis :
La solution retenue par la Cour de cassation peut sembler rigoureuse pour le salarié, qui s’est expressément engagé à faire son affaire de l’imposition des sommes perçues, mais pas à assumer les conséquences d’une erreur de l’employeur. La lecture de cet arrêt incitera le salarié prenant un tel engagement à bien vérifier les termes de la transaction avant de la signer, et, au vu des sommes en jeu, à se faire conseiller par un praticien du droit.
L’issue du contentieux aurait-elle été différente si la transaction n’avait pas comporté de clause spécifique en matière d’imposition des sommes perçues ? À notre sens, la solution aurait été identique au regard de la clause rédigée en termes généraux figurant également dans la transaction. En effet, dans la lignée de la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation depuis 2014, une telle clause dans la transaction fait obstacle au versement de toute somme au salarié de la part de l’employeur (Cass. soc. 11-1-2017 n° 15-20.040 FS-PB ; Cass. soc. 17-2-2021 n° 19-20.635 FS-PI).
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