En matière de transport routier international régi par la CMR, le transporteur est déchargé de sa responsabilité si la perte de la marchandise a pour cause des circonstances que le transporteur ne pouvait pas éviter et aux conséquences desquelles il ne pouvait pas obvier (CMR art. 17).
Il est déduit des constatations suivantes que le vol de bouteilles de champagne, qui devaient être acheminées de France jusqu'en Italie, est survenu dans de telles circonstances :
- des malfaiteurs ont intercepté le véhicule à un rond-point et, après avoir fait irruption dans la cabine, ont menacé le chauffeur avec une arme à feu en le malmenant et en l'obligeant à stationner sur un parking où ils l'ont frappé à la tête, projeté à l'intérieur d'un autre véhicule, baillonné et séquestré ;
- un tel vol, commis en réunion et avec violence à la suite d'un guet-apens, ne pouvait pas être évité par le verrouillage de la porte passager ;
- le véhicule circulait sur une voie qui n'était pas signalée comme dangereuse, de sorte que des précautions particulières ne s'imposaient pas.
En conséquence, la demande de l'expéditeur du champagne tendant à la réparation par le transporteur de son préjudice est rejetée.
A noter : Illustration de la notion de circonstances inévitables. A également été jugé insurmontable le vol commis de nuit sur une aire d'autoroute éclairée, près d'une station-service et d'un restaurant, par des individus armés de battes de base-ball, peu important que le départ en fin de journée ait impliqué un arrêt de nuit, s'agissant d'un transport international d'environ 900 km (Cass. com. 30-6-2004 n° 03-13.091 : BRDA 19/04 inf. 11) ou encore le vol d'une cargaison de fil de cuivre commis à l'intérieur d'un camion stationné au bord d'un axe fréquenté sans être particulièrement exposé au vol, avec violence et séquestration du chauffeur qui se trouvait à bord (Cass. com. 31-5-2011 n° 10-15.490 : RJDA 12/11 n° 1030). En revanche, ne constitue pas un événement insurmontable le vol à main armée d'un camion et de son chargement alors que le chauffeur venait de s'arrêter, en Italie, sur une aire de station-service située à 60 km de la frontière française pour déjeuner et faire sa toilette au motif que le transporteur, en sa qualité de professionnel, ne pouvait pas ignorer les risques encourus par les transporteurs dans ce pays ainsi que les recommandations des assureurs et de la profession de ne faire stationner les véhicules de transport de marchandises que dans des parcs gardés (Cass. com. 29-2-2000 n° 97-17.707 : RJDA 4/00 n° 414).
Pour rappel : la cause d'exonération de responsabilité envisagée par la CMR ne requiert pas que le transporteur établisse le caractère imprévisible de l'événement ayant causé la perte de la marchandise (Cass. com. 31-5-2011 précité). Elle ne coïncide donc pas exactement avec la force majeure de droit commun, de sorte que les décisions rendues sur le fondement de la CMR ne sont pas directement transposables aux transports intérieurs. La réforme du droit des contrats ne devrait rien y changer : le nouvel article 1218 du Code civil, qui définit la force majeure, exige également que l'événement invoqué comme constitutif de la force majeure ne puisse pas avoir été raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat.
Maya VANDEVELDE