Un contrat de franchise de boulangerie d’une durée de neuf ans prévoit l’obligation pour le franchisé de s’approvisionner exclusivement auprès d'un fournisseur qui a développé un concept particulier de fabrication de pains traditionnels au levain naturel. Le franchiseur ayant résilié le contrat de franchise, le fournisseur lui demande la réparation du préjudice résultant de la rupture fautive de la convention d’approvisionnement. Le franchiseur soutient alors que la clause d’approvisionnement exclusif est nulle car elle constitue une entente illicite, interdite par les articles 101, 1 du TFUE et L 420-1 du Code de commerce.
Argument rejeté. En matière de franchise, les clauses qui organisent le contrôle indispensable à la préservation de l’identité et de la réputation du réseau, symbolisé par l’enseigne, ne constituent pas des restrictions de concurrence, au sens des articles précités. En l’espèce, la clause était décisive pour l’image et l’identité du réseau de franchise : elle était nécessaire pour retrouver chez chaque franchisé une uniformité de qualité et de goût des produits, fabriqués selon un cahier des charges et un procédé propre au fabricant qui avait été choisi.
A noter : le contrat de franchise constitue un accord « vertical » susceptible de bénéficier du règlement européen d’exemption par catégorie 330/2010 du 20 avril 2010 relatif aux accords verticaux. Ce texte est applicable si la part de marché détenue par chaque entreprise à l’accord ne dépasse pas 30 % et si l’accord ne contient pas de restrictions de concurrence graves, dites « caractérisées » (par exemple, prix de vente minimaux imposés).
Au sens de ce texte, une clause d’approvisionnement exclusif constitue une obligation de non-concurrence, celle-ci étant définie notamment comme « toute obligation directe ou indirecte imposant à l’acheteur l’obligation d’acquérir auprès du fournisseur ou d’une autre entreprise désignée par le fournisseur plus de 80 % de ses achats annuels en biens ou services contractuels » (Règl. 330/2010 art. 1-d). L’exemption prévue par le règlement 330/2010 ne s’applique pas si l’obligation de non-concurrence est d’une durée indéterminée ou supérieure à cinq ans (art. 5, 1-a). La Commission européenne considère néanmoins qu’une obligation de non-concurrence prévue dans un contrat de franchise ne relève pas de l'article 101, 1 du TFUE lorsqu'elle est nécessaire au maintien de l'identité commune et de la réputation du réseau franchisé, à condition que sa durée n'excède pas celle de l'accord de franchise lui-même (Lignes directrices sur les restrictions verticales art. 190-b : JOUE 2010 C 130). La décision ci-dessus en constitue une illustration.
Dominique LOYER-BOUEZ
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Concurrence consommation n° 20535