La qualification d’avantages en nature s’applique aux avantages afférents à la mise à disposition d’un véhicule pour des déplacements dépourvus de caractère professionnel (Cass. 2e civ. 20-12-2007 n° 06-20.260 F-D). L’assujettissement des avantages en nature vaut y compris lorsque ces derniers sont attribués par l’intermédiaire d’un tiers auquel l’employeur rembourse le coût des avantages, par exemple par une autre société du groupe dont relève l’employeur des salariés (Cass. 2e civ. 9-11-2017 n° 16-22.572 F-D).
En l’espèce, les salariés de sociétés relevant du bâtiment et des travaux publics bénéficiaient de la mise à disposition permanente d’un véhicule fourni par une association à laquelle ils étaient appelés à adhérer, moyennant le versement d’une cotisation. L’association percevait par ailleurs de l’employeur les sommes qu’elle lui facturait au titre de l’utilisation professionnelle du véhicule.
Les sommes ainsi versées par l’employeur doivent-elles entrer dans l’assiette des cotisations et contributions sociales ?
Jusqu’à présent, les juges du fond considéraient notamment, pour assujettir l’avantage à cotisations et contributions sociales, que la cotisation versée à une association des utilisateurs de véhicules par les salariés, en l'échange de laquelle ils obtiennent un véhicule qu'ils peuvent utiliser aussi bien à des fins professionnelles que personnelles, est dérisoire et ne permet pas de couvrir la charge de leurs déplacements personnels. La deuxième chambre civile de la Cour de cassation cassait systématiquement les solutions en raison de motifs insuffisants à caractériser, dans son principe et dans son montant, l'avantage en nature litigieux (Cass. 2e civ. 7-9-2023 n° 21-15.408 F-D et 21-15.409 F-D : RJS 11/23 n° 597 ; Cass. 2e civ. 21-3-2024 n° 22-14.486 F-D).
Désormais, la deuxième chambre civile raisonne en deux temps.
Le véhicule mis à disposition par un tiers dont l'employeur assume la charge est un avantage en nature
Dans un premier temps, la Cour de cassation rappelle les règles d’assiette.
La mise à disposition permanente, par l’employeur, au profit de ses salariés, d’un véhicule pouvant être utilisé pour leurs déplacements privés, permettant ainsi aux bénéficiaires de faire l’économie de frais de transport qu’ils devraient normalement assumer, constitue, en principe, un avantage en nature.
La circonstance selon laquelle le véhicule est mis à la disposition permanente de salariés par l'intermédiaire d'un tiers ne saurait faire obstacle à la constatation de l'existence d'un avantage en nature, lorsque l'attribution de cet avantage résulte de l'appartenance des salariés à l'entreprise.
L’employeur doit prouver que la mise à disposition du véhicule est exclusive de tout avantage
Dans un second temps, la Cour de cassation précise les règles de preuve applicables.
S’il incombe à l’Urssaf d’établir la mise à disposition permanente du véhicule, notamment par le procès-verbal des agents de contrôle qui fait foi jusqu’à la preuve contraire, il appartient ensuite à l’employeur de démontrer que la mise à disposition, fût-ce par l’intermédiaire d’un tiers, est exclusive de tout avantage en nature.
L’employeur doit, par conséquent, rapporter la preuve qu'il prend exclusivement en charge le coût afférent aux kilomètres parcourus par ses salariés dans le cadre de leurs déplacements professionnels, sans aucune participation au coût de l'usage personnel du véhicule par ces derniers.
Cette preuve peut être rapportée par tout moyen, conformément à l’article 1358 du Code civil. Toutefois, elle ne peut pas résulter des seules facturations établies par le tiers qui met les véhicules à disposition des salariés, lesquelles doivent être corroborées par d’autres éléments de preuve.
Les juges du fond ayant constaté, dans les deux affaires, qu’une telle preuve n’était pas rapportée par l’employeur, c’est à bon droit qu’ils ont rejeté les demandes de ce dernier tendant à l’annulation du redressement opéré par l’organisme de recouvrement.
A noter :
La solution ainsi retenue confirme ainsi l’interprétation stricte qu’il y a lieu de retenir des règles d’assiette des cotisations et contributions et, plus particulièrement, des règles qui peuvent conduire à l’exonération des sommes et avantages dont le salarié bénéficie en contrepartie ou à l’occasion du travail. L’observation vaut non seulement pour l’application de la règle de fond, mais également pour l’administration de la preuve.
Documents et liens associés
Cass. 2e civ. 9-1-2025 n° 22-15.766 FS-B, Sté X. c/ Urssaf de Languedoc-Roussillon et 21-25.916 FS-B, Sté X. c/ Urssaf d’Aquitaine