Une maison est vendue. Les acheteurs sont informés par l’agent immobilier et le notaire de l’existence d’un sinistre causé par des fissures, ayant donné lieu, 10 ans auparavant, à une expertise et à un jugement, non communiqués, et à des travaux de renforcement des fondations. Les acheteurs se plaignent de nouvelles fissures et de la déformation du gros œuvre. Ils sollicitent une expertise qui confirme l’expertise précédente, validée par le jugement, qui concluait à la nécessité de démolir et de reconstruire la maison, ce qu’ils ignoraient. Ils assignent le vendeur et le notaire en indemnisation de leur préjudice. Le notaire appelle en garantie l’agent immobilier. Les acheteurs font valoir que la maison est affectée d’un vice caché que le vendeur ne pouvait méconnaître et que l’agent immobilier et le notaire ont gravement manqué à leurs obligations d’information et de conseil. Ils indiquent choisir de conserver l’immeuble et sollicitent la restitution du prix de vente, le paiement du coût de la démolition et de la reconstruction, et l’indemnisation de préjudices annexes.
La cour d’appel de Bourges condamne le vendeur à la restitution d’une partie du prix de vente (coût de la maison hors terrain), aux coûts de reprise et aux préjudices annexes, au motif qu’il connaissait parfaitement les vices affectant la maison qu’il a sciemment cachés aux acheteurs. Elle condamne le notaire et l’agent immobilier à supporter chacun 10 % des sommes mises à la charge du vendeur. Le notaire est, selon elle, responsable de ne pas avoir joint à l’acte de vente le jugement qui aurait permis aux acheteurs de connaître l’ampleur réelle du sinistre. Et l’agent immobilier est fautif pour avoir seulement mentionné dans la promesse de vente l’existence du sinistre sans effectuer de recherches supplémentaires.
La Cour de cassation confirme la responsabilité de principe mais censure la cour d’appel sur l’étendue des réparations. Elle exclut la condamnation du vendeur à payer à la fois la restitution d’une partie du prix de vente et le coût de la démolition et de la reconstruction alors que l’un et l’autre compensent la perte de l’utilité de la chose. Elle censure la condamnation du notaire et de l’agent immobilier à supporter la restitution du prix de vente au motif qu’elle ne constitue pas par elle-même un préjudice indemnisable ouvrant droit à réparation.
A noter : La mise en œuvre de la garantie des vices cachés suppose que le défaut invoqué rende le bien acquis impropre à l’usage auquel l’acheteur le destinait (C. civ. art 1641). Tel est le cas dans l’arrêt commenté, l’expert préconisant de démolir et reconstruire le bien. Pour autant, le principe de la réparation intégrale exclut le cumul de condamnations du vendeur.
L’existence d’une faute commise par le notaire ne suffit pas à entraîner sa condamnation. Il faut qu’il en résulte un préjudice. Il a déjà été jugé que la restitution à laquelle le vendeur est condamné à la suite de l’annulation d’une vente ne constitue pas par elle-même un préjudice indemnisable (Cass. 1e civ. 18-1-2005 n° 03-12.713 à propos de la nullité d’une vente pour vice de propriété).
La Cour de cassation applique ce raisonnement, pour la première fois à notre connaissance, à l’action estimatoire qui permet à l’acheteur de conserver le bien et de se faire rendre une partie du prix (C. civ. art 1644).
Séverine JAILLOT
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Gestion immobilière n° 50090