En matière de transport routier international de marchandises, la convention de Genève du 19 mai 1956 (CMR) décharge le transporteur de sa responsabilité en cas de perte des marchandises transportées si celle-ci a eu pour cause des circonstances que le transporteur ne pouvait pas éviter et aux conséquences desquelles il ne pouvait pas obvier (art. 17, 2).
Une société de droit anglais vend 32 palettes de bouteilles de whisky à une société française et en confie l’acheminement à un transporteur depuis le Royaume-Uni jusqu’en France. Lors du transport, la cargaison est déposée dans un aérodrome, où elle est volée ainsi que la remorque. Le transporteur est poursuivi en paiement de diverses sommes au titre de la marchandise volée, sur le fondement de l’article 17, 2 précité.
Jugé que la responsabilité du transporteur ne pouvait pas être retenue, compte tenu de l’existence des circonstances suivantes qu'il ne pouvait pas éviter et aux circonstances desquelles il ne pouvait obvier :
le vol avait été commis sur un espace de stationnement loué à cet effet par le transporteur au sein d’un aéroport, lequel bénéficiait, dans l’attente du changement de chauffeur, de visibles mesures de sécurité (portails de sécurité, caméras de surveillance aux entrées principales, agents de sécurité, etc.) ;
le fait que les voleurs aient déjoué la protection de l’accès de la zone et se soient introduits par effraction, sans qu'il y ait eu de précédent de même nature, caractérisait des circonstances exceptionnelles que le transporteur ne pouvait pas éviter ;
les déclarations du responsable du site quant à l’insuffisante effectivité des mesures de sécurité, le défaut d’éclairage ou encore la présence d’une publicité pour une boisson alcoolisée sur la remorque étaient sans conséquence, dès lors que rien n’indiquait que le transporteur aurait dû ou pu se rendre compte, avant le vol, des failles de sécurité, ni par quel moyen il aurait pu y remédier.
A noter :
L'arrêt commenté illustre la notion de circonstances que le transporteur ne pouvait pas éviter et aux conséquences desquelles il ne pouvait obvier, au sens de l'article 17, 2 de la CMR.
A également été jugé insurmontable le vol commis, dans une zone non signalée comme dangereuse, avec violence et séquestration du chauffeur qui se trouvait à bord, celui-ci ayant été victime d'un stratagème (Cass. com. 31-5-2011 n° 10-15.490 F-D : RJDA 12/11 n° 1030 ; Cass. com. 14-6-2016 n° 14-11.664 F-D : RJDA 11/16 n° 780) ou encore le vol commis de nuit avec agression du chauffeur qui dormait dans son véhicule, portes verrouillées, alors qu'il stationnait dans un site privé non particulièrement dangereux, l'existence d'un parking clos et surveillé à proximité n'étant pas rapportée (Cass. com. 9-4-2013 n° 11-28.360 F-D : RJDA 7/13 n° 616). En revanche, ne constitue pas un événement insurmontable le vol à main armée survenu sur un parking non gardé, alors que le chauffeur ne pouvait pas ignorer les risques de vol dans cette zone (Cass. com. 29-2-2000 n° 97-17.707 P : RJDA 4/00 n° 414 ; Cass. com. 2-6-2004 n° 02-20.846 FS-P : RJDA 11/04 n° 1214).
Récemment, la Cour de cassation a écarté la responsabilité d'un transporteur pour un premier vol commis avec violence par de faux policiers, mais l'a retenue pour un second vol réalisé dans des conditions similaires, le transporteur n'ayant tiré aucune conséquence du précédent vol pour améliorer les conditions de sécurité du transport (Cass. com. 30-1-2019 n° 17-16.604 F-D : RJDA 5/19 n° 335).
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