Dans toutes les instances devant les juridictions administratives, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens (C. just. adm. art. L 761-1).
À Marseille, un permis de construire 16 villas individuelles est attaqué en justice. Le juge, constatant que le permis, illégal, est régularisable, sursoit à statuer (C. urb. art. L 600-5-1). Un permis de régularisation est délivré. L’auteur du recours est-il « partie perdante » et donc, tenu au paiement des frais exposés par l’autre partie ?
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Pour le Conseil d’État, le paiement des sommes exposées et non comprises dans les dépens ne peut être mis à la charge que de la partie qui perd pour l'essentiel. La circonstance qu’au vu de la régularisation intervenue en cours d’instance, le juge rejette finalement les conclusions dirigées contre le permis de construire initial, dont l’auteur du recours était fondé à soutenir qu’il était illégal et dont il est, par son recours, à l’origine de la régularisation, ne doit pas, à elle seule, conduire le juge à mettre les frais à sa charge ou à rejeter les conclusions qu’il présente à ce titre. En l’espèce, le juge a rejeté l’ensemble des conclusions des parties présentées au titre de l’article L 761-1 du Code de justice administrative.
A noter :
Les « frais exposés et non compris dans les dépens » correspondent, en pratique, aux honoraires d’avocat. Le juge met en principe les frais exposés par la partie gagnante à la charge de la partie perdante. Il peut cependant être délicat de déterminer qui perd et qui gagne. La jurisprudence recourt alors à la notion de partie « qui perd pour l’essentiel ».
Prenons le cas d’un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire. Le juge constate que ce permis est entaché d’illégalité mais qu’il est régularisable et il fixe un délai à cet effet (C. urb. art. L 600-5-1). Constatant, à l’issue de ce délai, que le permis a été régularisé, il rejette le recours. Dans une telle configuration, le Conseil d’État avait estimé que le tiers qui avait attaqué le permis devait être regardée comme la partie perdante et assumer les frais que le titulaire du permis avait exposés pour se défendre (CE 19-6-2017 n° 394677, Syndicat des copropriétaires de la résidence Butte Stendhal). Dans l’arrêt commenté, le Conseil d’État revient sur cette solution et juge que le rejet du recours n’implique pas « à lui seul » que le tiers doive être regardé comme la partie perdante. En l’espèce, il laisse chaque partie assumer les frais qu’elle a engagés. La formulation est prudente et laisse ouverte la possibilité de désigner un perdant en fonction des circonstances particulières d’une espèce. On peut néanmoins penser qu’en cas de régularisation du permis attaqué à la suite d’un sursis à statuer les juridictions se borneront désormais, le plus souvent, à laisser chacune des deux parties assumer ses propres frais.