Deux époux souscrivent conjointement un contrat d’assurance-vie. Ils désignent à titre de bénéficiaires leurs enfants nés ou à naître et à défaut leurs héritiers. Par testament olographe, l’épouse institue, en cas de prédécès de son conjoint :
- comme légataires universels en usufruit six personnes de sa famille (une nièce, trois nièces et une petite-nièce par alliance ainsi que son frère) ;
- comme légataires universels en nue-propriété les enfants de ces légataires universels en usufruit.
Le mari puis l’épouse décèdent, sans enfant. L’épouse laisse pour lui succéder son frère qui perçoit le capital de l’assurance-vie. Les légataires contestent ce versement.
La cour d’appel rejette leurs prétentions. En l’absence de bénéficiaire désigné, le capital décès ou la rente est versé, hors part successorale, à l’héritier de l’assuré. Or, seul le frère, parent collatéral au seconde degré de la défunte, peut revendiquer cette qualité puisque les appelants sont légataires à titre universel et non universel.
Censure de la Cour de cassation. Les legs portant sur la nue-propriété et l’usufruit de l’ensemble des biens composant la succession et ceux portant sur la nue-propriété de ces biens constituent des legs universels. Il incombe aux juges du fond de rechercher si l’épouse avait eu la volonté, ou non, de faire bénéficier les légataires des capitaux garantis par le contrat d’assurance-vie.
à noter : Dans l’affaire commentée, il s’agissait d’identifier les héritiers susceptibles de percevoir le capital d’une assurance-vie. Si la qualité d’héritier résulte en principe de la loi, elle peut également être transmise par testament. C’est le cas du légataire universel qui a une vocation sur l’ensemble de la succession, c’est-à-dire un droit universel identique à celui de l’héritier (Ph. Malaurie et L. Aynès : Les successions Les libéralités Defrénois 2008 n° 532).
Cette qualité de légataire universel ne revient pas seulement au bénéficiaire d’un legs en pleine propriété de tous les biens de la succession. Elle s’applique aussi à celui qui reçoit un legs portant sur la nue-propriété des biens de la succession, l’usufruit se réunissant à la nue-propriété au décès de l’usufruitier (Cass. 1e civ. 22-10-1959 : D. 1960 somm. 49). L’arrêt commenté confirme cette jurisprudence ancienne. Le legs de l’usufruit de la succession est quant à lui à titre universel (Cass. req. 29-6-1910 : DP 1911 I p. 49, note H. Capitant).
En pratique : dans cette affaire, les légataires universels en nue-propriété pouvaient donc être assimilés aux héritiers désignés dans le contrat d’assurance-vie. Il relevait ensuite du pouvoir des juges du fond d’interpréter la clause bénéficiaire en recherchant l’intention poursuivie par le souscripteur, celle de faire bénéficier ou non les légataires en nue-propriété du capital (pour un exemple, voir Cass. 2e civ. 12-5-2010 n° 09-11.256 : BPAT 4/10 inf. 232).
Pour en savoir plus sur la détermination du bénéficiaire d'un contrat d'assurance-vie : Mémento Patrimoine, nos 28315 s.