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Bail commercial : prescription de l’action en régularisation des charges

Contrairement à ce que soutient un locataire commercial, l'action en régularisation des charges locatives ne se prescrit pas par deux ans à compter de la date à laquelle le bailleur aurait dû lui communiquer l'état récapitulatif annuel des charges.

CA Paris 5-9-2024, ch. 5-3, n° 23/01839, SAS Elite D&B c/ SAS M45


Par Geoffrey MEYER
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©Getty Images

Toutes les actions en justice exercées en application du statut des baux commerciaux se prescrivent par deux ans (C. com. art. L 145-60).  

Le propriétaire d’un local commercial situé dans une copropriété réclame à son locataire le paiement d’une certaine somme au titre de la régularisation de charges locatives. Le locataire lui oppose la prescription de ses demandes, en développant le raisonnement suivant : le bailleur doit fournir au locataire un état récapitulatif annuel incluant la liquidation et la régularisation des comptes de charges et ce, dans le délai de trois mois à compter de la reddition des charges de copropriété sur l'exercice annuel (C. com. art. L 145-40-2 issu de loi 2014-626 du 18-6-2014 dite « loi Pinel »et art. R 145-36). Il résulte de l’application combinée de ces articles L 145-40-2 et R 145-36 avec l’article L 145-60 que l’action en régularisation de charges du bailleur-copropriétaire échappe à la prescription de droit commun et se prescrit par 2 ans à compter de l’expiration du délai de 3 mois de la reddition des charges de copropriété. L’action en justice du bailleur plus de 2 ans après les appels de fonds nécessaires aux travaux effectués par le syndicat des copropriétaires, et alors que le bailleur n’avait jamais procédé à la régularisation annuelle des charges en cours de bail, était donc prescrite.

La cour d’appel de Paris écarte ce raisonnement : le Code de commerce ne prévoit aucune sanction spécifique en cas de manquement à l'obligation de régularisation des charges, et les demandes en paiement du bailleur portant sur une telle régularisation ne relèvent pas du statut des baux commerciaux mais de l’application pure et simple du droit des contrats, de sorte qu’elles sont soumises à la prescription quinquennale de droit commun.

A noter :

1° En l’espèce, le locataire paraissait soutenir que, l'action du bailleur étant fondée sur les dispositions de l'article R 145-36 relatives à l'état récapitulatif des charges, il y avait lieu d'appliquer le délai de prescription biennal prévu pour toutes les actions exercées en vertu du statut des baux commerciaux (art. L 145-60) ; il faisait alors valoir que ce délai avait commencé à courir à la date à laquelle il aurait dû avoir communication de l’état récapitulatif annuel, c’est-à-dire à l’expiration du délai de 3 mois suivant la date de reddition des charges de copropriété sur l'exercice annuel (C. com. art. R 145-36, applicable aux baux conclus ou renouvelés après le 5-11-2014), de sorte que l'action du bailleur, engagée plus de deux ans après cette date, était prescrite. La cour d’appel de Paris écarte l’argument, relevant l’absence de sanction prévue par ce texte.

La prescription de droit commun, ici applicable, court à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer (C. civ. art. 2224 et 2227). Il a été jugé que le point de départ de la prescription quinquennale de l'action en paiement des travaux de ravalement n'est constitué ni par le vote des travaux de ravalement par l'assemblée générale des copropriétaires ni par les appels de fonds du syndic, mais par l'arrêté du compte des charges incluant le coût total des travaux de ravalement (CA Paris 9-10-2013 n° 10/25204).

2° De nombreuses actions en paiement ne relèvent pas du statut des baux commerciaux et sont donc soumises à la prescription quinquennale de droit commun. Tel est, par exemple, le cas des actions en paiement d'une indemnité de résiliation anticipée stipulée dans le bail (Cass. 3e civ. 9-3-2023 n° 21-20.358 F-D : RJDA 6/23 n° 304), d'un arriéré de loyers (CA Colmar 31-8-2011 n° 10/05165), d'une indemnité compensatoire en raison d'un retard dans l'exécution de travaux (Cass. 3e civ. 14-1-2016 n° 14-23.134 F-D) ou de travaux de ravalement (CA Paris 9-10-2013 n° 10/25204).

Documents et liens associés : 

CA Paris 5-9-2024, ch. 5-3, n° 23/01839

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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