Dans le cadre d’un contrat de construction de maison individuelle (CCMI) avec fourniture du plan, des particuliers assignent le constructeur en remboursement de sommes versées au titre de travaux mal ou non chiffrés par le constructeur et de la révision du prix. La cour d’appel accueille ces demandes et condamne le constructeur. Ce dernier fait valoir que seuls doivent être chiffrés les travaux indispensables à l’utilisation de l’immeuble et les prestations présentes dans la notice descriptive. Selon lui, le défaut de prévision et de chiffrage des travaux doit être sanctionné par la nullité du contrat. Il défend également que les particuliers étaient parfaitement informés des modalités de révision du prix.
Le pourvoi concernant le chiffrage des travaux est rejeté. Tous les travaux prévus par le CCMI doivent être chiffrés, même s’ils ne sont pas indispensables à l’implantation de la maison ou à son utilisation. Il en est de même pour tous les travaux prévus dans la notice descriptive et ceux qui figurent sur les plans, même si le maître de l’ouvrage s’en réserve l’exécution. Il en résulte que le maître de l'ouvrage peut demander, à titre de réparation, que soient mis à la charge du constructeur le coût des travaux prévus au contrat non chiffrés et le coût supplémentaire de ceux chiffrés de manière non réaliste.
En revanche, la Cour de cassation casse l’arrêt sur la question de la révision du prix. Elle relève que les particuliers ont été suffisamment informés des différentes possibilités de révision du prix avant la signature du CCMI, que les modalités de révision ont été reproduites dans les conditions générales, que dans les conditions particulières ils ont coché la case correspondant à la modalité de révision choisie et qu'ils ont signé la mention manuscrite « Je reconnais avoir pris connaissance des modalités de révision du prix ».
A noter :
1. La Cour de cassation rappelle le principe fondamental selon lequel le maître de l’ouvrage doit connaître exactement le coût total du CCMI afin de lui éviter de s’engager dans une opération qu’il ne pourra pas financer (Cass. 3e civ. 10-11-2021 n° 20-19.323 FS-B : BPIM 1/22 inf. 35). La jurisprudence applique avec fermeté les textes d’ordre public qui contraignent le constructeur à anticiper au plus près le prix forfaitaire et définitif de la construction dès la conclusion du CCMI. Tous les travaux, même non indispensables, doivent être chiffrés dès lors qu’ils sont nécessaires à la réalisation de la maison prévue par les parties (CCH art. L 231-2 et R 231-4). Il est fréquent que le plan joint au CCMI mentionne des équipements (clôtures, portail, espaces verts…) qui ne figurent pas dans la notice descriptive type agréée par l’arrêté EQUC9101692A du 27 novembre 1991. Ces travaux doivent faire l’objet d’une annexe avec chiffrage. Seuls des travaux non indispensables et indéterminables peuvent échapper à cette obligation (Cass. 3e civ. 11-3-2015 n° 14-10.002 F-D). Le maître de l’ouvrage peut demander que les travaux non chiffrés ou chiffrés de manière non réaliste soient mis à la charge du constructeur et, dans ce dernier cas, le constructeur doit seulement supporter la différence de prix (Cass. 3e civ. 10-11-2021 n° 20-19.323 FS-B : BPIM 1/22 inf. 35). Cette sanction s’applique également aux travaux qui ne sont pas indispensables à l’utilisation de la maison. En revanche, la nullité du CCMI s’impose en cas d'absence de clause manuscrite par laquelle le maître de l'ouvrage précise et accepte les travaux à sa charge qui ne sont pas compris dans le prix convenu (Cass. 3e civ. 21-6-2018 n° 17-10.175 FS-PBI : BPIM 4/18 inf. 270).
2. L’information du maître de l’ouvrage sur l’éventuelle révision du prix du CCMI est tout aussi importante que le chiffrage du prix lui-même. Dans l’arrêt commenté, la Cour de cassation considère que le maître de l’ouvrage est parfaitement informé des modalités de révision du prix lorsque le contrat mentionne les deux options de calcul de la révision (CCH art. L 231-11), le terme des périodes de calcul de la révision (CCH art. L 231-12) et que le maître de l’ouvrage reconnaît « avoir pris connaissance des modalités de révision du prix ».