Des époux donnent à leur petite-fille la nue-propriété d’un immeuble, avec obligation de les soigner et de leur apporter l’assistance nécessaire. Les donateurs décèdent successivement, laissant deux enfants. L’un d’eux réclame la réduction de la libéralité pour dépassement de la quotité disponible. Pour le vérifier, il faut procéder à la réunion fictive de la donation à la masse de calcul (composée des biens existant au décès), après déduction des dettes et charges la grevant (C. civ. art. 922). Sur ce dernier point, la petite-fille avance que l’obligation de soins est déductible pour une valeur correspondant au temps consacré aux soins. La cour d’appel estime au contraire que la charge n’est pas déductible. Elle s’appuie sur les éléments suivants :
- la donation contenait une clause obligeant la donataire à soigner les donateurs ou le survivant d’eux ;
- la donataire, salariée de ses grands-parents, assurait comme telle la gestion locative d’appartements meublés et un logement était mis à sa disposition ;
- elle assurait son obligation de soins pendant son temps de travail, sans que cela excède des secours ponctuels, ses grands-parents ayant bénéficié de l’assistance d’infirmiers et d'employés de maison ;
- les charges que le respect de l’obligation de soins a pu entraîner ne sont ni justifiées ni même exposées par la donataire.
La Cour de cassation confirme la décision. Lorsqu’une donation est assortie, au profit du donateur, d’une obligation de soins, seul l’émolument net procuré par la libéralité est réuni fictivement à la masse de calcul de la réserve. Le montant de la charge doit être déterminé en considération du manque à gagner ou des frais que son exécution a occasionnés pour le donataire.
A noter : lorsque la charge consiste à payer une rente, et que le bien donné est frugifère (autrement dit qui procure des revenus), le montant de cette charge n'est déductible qu'après avoir été diminué des revenus tirés par le donataire du bien donné (Cass. 1e civ. 24-11-1987 n° 86-11.682 : D. 1988 somm. p. 260 note G. Morin, solution retenue pour le rapport mais transposable à la réduction). La rente étant une charge périodique, son montant déductible doit être fixé au jour de son exécution et non pas réévalué au jour de l'ouverture de la succession (Cass. 1e civ. 17-12-1991 n° 90-12.191 : D. 1993 somm. p. 228 note B. Vareille).
Florence GALL-KIESMANN
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Patrimoine n° 22524