Deux résidences soumises chacune au statut de la copropriété se partagent une chaudière, localisée dans le sous-sol de l’une d’elles, qui alimente chacun des syndicats en chauffage et en eau chaude.
Ce partage entraîne, d'une part, une surconsommation de combustible et, d'autre part, une température brûlante de sortie de l'eau chaude sanitaire et/ou de chauffage pour l'une des deux résidences afin de permettre que cette température soit suffisante une fois le fluide envoyé à l'autre ensemble immobilier.
Pour remédier aux problèmes, le syndicat de la résidence accueillant la chaudière assigne l'autre afin d'être autorisé à découpler l'installation. En réponse, le syndicat voisin se prévaut de l'existence d'une servitude conventionnelle sur le local à usage de chaufferie.
Se fondant sur les articles 690 et 691 du Code civil, qui disposent que les servitudes continues et apparentes s'acquièrent par titre, ou par la possession de 30 ans et que les servitudes continues non apparentes, et les servitudes discontinues apparentes ou non apparentes, ne peuvent s'établir que par titres, la cour d'appel reconnaît l'existence de la servitude conventionnelle et rejette la demande de découplage. Elle relève que les procès-verbaux d'assemblées font mention de la localisation de la chaufferie, de la répartition des frais et de la souscription d'un contrat d'entretien commun aux deux résidences. Elle retient donc une démarche active du syndicat de la résidence d’implantation de la chaufferie d’accorder au syndicat de l’autre résidence une servitude d’utilisation de son local de chaufferie.
Censure de la Cour de cassation. Les procès-verbaux d'assemblées pris en considération ne caractérisent pas une volonté claire et non équivoque du syndicat de la résidence dans laquelle se situe la chaufferie de créer une servitude d'usage grevant son fonds au profit de celui du syndicat de la résidence voisine. Une fois l'existence d'une servitude écartée, la demande de découplage ne pouvait pas être rejetée sur ce fondement.
A noter :
Le promoteur des deux résidences aura donc été bien léger. Techniquement d'abord, car le système de chaudière partagée retenu n'apportait pas un confort similaire aux deux ensembles et consommait beaucoup. Juridiquement ensuite, car l'existence d'une servitude aurait pu être établie dans le règlement de copropriété, par une clause dépourvue d'ambiguïté. Le Code civil prévoit, en effet, que les servitudes continues mais non apparentes, ainsi que les servitudes discontinues, apparentes ou non, ne peuvent s'établir que par titres. Leur acquisition par prescription est exclue. La possession, même immémoriale, ne suffit donc pas pour les établir.