Une société, en désaccord avec son commissaire aux comptes sur le montant des honoraires qu'il lui réclamait en vue de la certification de ses comptes, demande en justice qu'il soit relevé de ses fonctions. Une cour d'appel rejette cette demande au motif qu'un litige sur les honoraires du commissaire aux comptes est soumis à une procédure spécifique régie par les articles R 823-18 et s. du Code de commerce.
La Cour de cassation censure cette décision. La cour d'appel aurait dû rechercher, comme elle y était invitée, si le commissaire aux comptes n'avait pas affirmé à la société que les honoraires réclamés relevaient d'un barème légal alors qu'ils sont librement convenus par les parties, et, dans l'affirmative, s'il n'avait pas cherché à l'induire en erreur, ce qui aurait constitué un manquement à son obligation de probité, de nature à justifier le relèvement de ses fonctions.
A noter :
Les honoraires des commissaires aux comptes dûs par l'entité contrôlée ne résultent pas d'une tarification automatique proportionnelle au montant total du bilan, comme c'était le cas auparavant (Décret 69-810 du 12-8-1969 abrogé par Décret 85-665 du 3-7-1985), mais d'une libre négociation entre les parties (C. com. art. R 823-15) et ils dépendent du nombre d'heures de travail estimé, lequel doit être conforme à une fourchette fixée par décret (C. com. art. R 823-12).
Les litiges relatifs au montant de la rémunération des commissaires aux comptes pour leur mission de certification de comptes doivent, après tentative de conciliation demeurée infructueuse devant le président de la compagnie régionale des commissaires aux comptes, être portés devant la formation restreinte du Haut Conseil du commissariat aux comptes (C. com. art. R 823-18 et R 823-19). Selon la cour d'appel, c'est cette procédure qui aurait dû être suivie par la société.
Néanmoins, comme le suggère la Cour de cassation, il y avait dans cette affaire plus qu'un simple désaccord sur le montant des honoraires, mais un comportement du commissaire aux comptes qui, s'il est avéré, justifierait qu'il soit mis fin à ses fonctions.
En effet, en cas de faute, les commissaires aux comptes peuvent être relevés de leurs fonctions par décision de justice à la demande, notamment, de l'organe chargé de la direction ou d'un ou de plusieurs associés représentant au moins 5 % du capital (C. com. art. L 823-7). Il ressort de la jurisprudence que deux types de griefs peuvent justifier le relèvement : une carence dans l'accomplissement des devoirs professionnels ; un excès de zèle dans l'exécution des tâches (CNCC, La nomination et la cessation des fonctions du commissaire aux comptes : Études juridiques CNCC département édition, juin 2022 n° 288). En particulier, justifient un relèvement de fonctions des agissements portant directement atteinte aux intérêts de l'entité contrôlée et servant ceux du commissaire aux comptes, comme le fait de solliciter de l'entité le paiement d'une facture d'honoraires afférents à une prestation d'assistant à un tiers, cocontractant de cette entité (Cass. com. 10-7-2007 n° 06-13.423 : RJDA 11/07 n° 1119).
Documents et liens associés
Cass. com. 4-1-2023 n° 21-14.547 F-D, Sté Indoro France c/ Sté H.