Des époux mariés sous la communauté légale divorcent. Des difficultés surviennent lors de la liquidation et du partage de leurs intérêts patrimoniaux. La cour d’appel reconnaît l’existence d’une récompense due par l’ex-mari à la communauté en raison de la construction sur un terrain propre d’une maison au moyen de fonds communs. Pour l’évaluer à 208 000 €, les juges du fond retiennent que :
l’expertise judiciaire a permis d’évaluer à cette somme la valeur vénale de la construction seule, hors terrain ;
il n’y a pas lieu d’évaluer le montant de la récompense en déduisant la valeur du terrain de la valeur vénale de l’ensemble immobilier, la cour d’appel ayant pris soin de demander une évaluation distincte de la construction seule et de l’ensemble.
L’ex-mari conteste cette méthode de calcul et se pourvoit en cassation.
Au visa de l’article 1469 du Code civil, la Haute Juridiction censure l’arrêt. Pour déterminer l’avantage réellement procuré au patrimoine de l’époux, il convenait :
d’abord, de chiffrer la plus-value procurée à l’immeuble par les travaux d’amélioration en déduisant de la valeur de ce bien au jour de sa liquidation celle qu’il aurait eue à la même date sans les travaux réalisés ;
ensuite, de déterminer le profit subsistant d’après la proportion dans laquelle les fonds empruntés à la communauté avaient contribué aux travaux d’amélioration.
A noter :
Par l’effet de l’accession, l’immeuble édifié sur un terrain propre à l’ex-époux lui est propre, moyennant toutefois récompense à la communauté qui a participé en tout ou partie au financement de la construction (Cass. 1e civ. 26-9-2012 n° 11-20.196 F-PBI : Sol. Not. 11/12 inf. 290). La récompense « ne peut être moindre que le profit subsistant, quand la valeur empruntée a servi à acquérir, conserver ou améliorer un bien qui se retrouve, au jour de la liquidation de la communauté, dans le patrimoine emprunteur » (C. civ. art. 1469, al. 3). Reste ensuite la question du calcul du profit subsistant. Il est aujourd’hui bien établi que le profit subsistant se détermine d'après la proportion dans laquelle les fonds empruntés à la communauté ont contribué au financement de l’amélioration d’un bien propre (Cass. 1e civ. 11-3-2009 n° 07-21.356 F-PB : BPAT 3/09 inf. 96 ; Cass. 1e civ. 4-11-2010 n° 09-15.838 F-D : BPAT 6/10 inf. 320 ; Cass. 1e civ. 26-10-2011 n° 10-23.994 F-PBI : Sol. Not. 5/11 inf. 137). Le calcul de la récompense, lorsqu'elle doit être égale au profit subsistant, se fait donc en deux temps : chiffrage de la plus-value et détermination du profit subsistant selon la méthode rappelée dans l’arrêt, de jurisprudence constante (Cass. 1e civ. 28-10-2009 n° 08-13.540 F-D : BPAT 6/09 inf. 222, 2e espèce ; Cass. 1e civ. 4-11-2010 n° 09-15.838 précité ; Cass. 1e civ. 10-10-2012 n° 11-20.585 F-PBI : BPAT 6/12 inf. 285).
Au cas particulier, la communauté ayant financé 100% de la construction, les juges d’appel ont cru bon de retenir la valeur vénale de la construction seule, correspondant à la différence entre la valeur actuelle de l’immeuble et la valeur actuelle du terrain seul. Ce « raccourci » n’a toutefois pas été admis par la Cour de cassation car ce raisonnement reviendrait à dire que le profit subsistant correspond à la valeur du bien construit alors qu’en réalité il faut déterminer la plus-value procurée par la construction au terrain.