Un homme, marié en séparation de biens, se porte caution solidaire pour garantir un prêt consenti à une société dont il est associé. La société est mise en liquidation judiciaire. En paiement de sa créance, la banque assigne alors l’associé et son épouse pour voir ordonner le partage de l’indivision existant entre eux et, pour y parvenir, la licitation du bien immobilier indivis servant au logement de la famille. Le débiteur oppose l’article 215, alinéa 3 du Code civil qui impose la cogestion entre époux pour tout acte qui risquerait de priver la famille de son logement. La cour d’appel écarte l’argument et fait droit à la demande du créancier.
La Cour de cassation confirme. Les dispositions protectrices du logement familial de l’article 215, alinéa 3 du Code civil ne peuvent, hors le cas de fraude, être opposées aux créanciers personnels d’un indivisaire usant de la faculté de provoquer le partage au nom de leur débiteur en application de l’article 815-17, alinéa 3 du même Code.
À noter : Confirmation de jurisprudence. L'article 215, alinéa 3 du Code civil a vocation à protéger un époux contre les actes de disposition qu’accomplirait son conjoint sur le logement de la famille (vente, donation…) mais non contre les mesures d’exécution engagées par des tiers. Dès lors, les créanciers d’un époux peuvent notamment, hors le cas de fraude :
- demander l’inscription d’une hypothèque judiciaire (Cass. 1e civ. 4-10-1983 n° 82-13.781 : Bull. civ. I n° 216, JCP 1984 II p. 20188 note Y. Chartier) ;
- agir en vente forcée du logement (Cass. 3e civ. 12-10-1977 n° 76-12.482 : Bull. civ. III n° 345, D. 1978 p. 333 note Y. Chartier ; Cass. 1e civ. 24-2-1993 n° 91-04.140 : Bull. civ. I n° 85, RTD civ. 1994 p. 664 obs. B. Vareille) ;
- ou encore, comme en l’espèce, provoquer le partage du bien s’il est indivis (C. civ. art. 815-17 ; Cass. 1e civ. 3-12-1991 n° 90-13.311 : Defrénois 1992 art. 35220 obs. G. Champenois).
La solution s’explique : rendre l’article 215, alinéa 3 du Code civil opposable aux créanciers conduirait à l’insaisissabilité du logement familial, ce qui serait contraire à la loi (Cass. 1e civ. 4-7-1978 n° 76-15.253 : Bull. civ. I n° 256, D. 1979 p. 479).
Nous réserverons toutefois le cas particulier de l’entrepreneur individuel, pour lequel existe un régime d’insaisissabilité de la résidence principale par ses créanciers professionnels (C. com. art. L 526-1 s.).
Florence GALL-KIESMANN
Pour en savoir plus sur cette question, voir Mémento Droit de la famille n° 1770
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