Une sous-filiale qui a accordé des avances de trésorerie à sa société mère ne justifie pas de l’existence de relations commerciales entre ces deux sociétés en soutenant qu’elle entretenait historiquement des relations commerciales avec sa mère lors de l’octroi de ces avances et en se prévalant à cet égard d’une convention de « management fees » et de la centralisation des achats avec leurs fournisseurs.
Ces avances constituent un acte anormal de gestion dès lors que leur montant apparaît hors de proportion avec la solvabilité de la société mère compte tenu du montant des capitaux propres de cette dernière et de ses résultats financiers qui ne sont pas de nature à établir l’existence de difficultés financières majeures. En outre, la sous-filiale ne justifie pas que les avances consenties étaient nécessaires pour éviter la liquidation de la société mère dans des conditions telles qu’elle entraînerait elle-même sa liquidation.
Par suite, le montant des provisions pour dépréciation de créances constituées par la sous-filiale, correspondant à ces avances de trésorerie, doit être réintégré dans son bénéfice imposable.
A noter :
La cour reprend et applique le principe posé par le Conseil d’Etat selon lequel l’avance de trésorerie consentie par une sous-filiale à la société mère en difficulté, avec laquelle elle n'entretient aucune relation commerciale, ne relève pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, dès lors que cette avance, même assortie du versement d'intérêts, est d'un montant manifestement hors de proportion avec la solvabilité du bénéficiaire (CE 22-1-2010 no 313868).
Dans ses conclusions rendues en l’espèce pour la décision de non-admission du pourvoi de la société requérante, la rapporteure publique, Emilie Bokdam-Tognetti, s’est interrogée sur le point de savoir si le critère tiré du montant hors de proportion des avances ne pourrait pas apparaître comme un critère de risque manifestement excessif au vu de la probabilité de non-remboursement. On sait en effet que la théorie du risque manifestement excessif a été abandonnée par la Haute Juridiction (CE 13-7-2016 no 375801, voir La Quotidienne du 25 juillet 2016). Elle relève à cet égard que la décision précitée du 22 janvier 2010 « n’a pas expressément apprécié la disproportion entre le montant de l’aide accordée et la solvabilité entendue comme la faculté de remboursement, mais la disproportion entre le montant de l’avance et celui des besoins en trésorerie avérés de l’entreprise ». Elle souligne ensuite que la cour administrative d’appel de Bordeaux ne renvoie pas, en l’espèce, à cette notion de risque excessif en jugeant la disproportion caractérisée au vu du montant des capitaux propres de la société et de ses résultats financiers. Emilie Bokdam-Tognetti précise enfin que cette décision du 22 janvier 2010 « vise précisément le cas où il n’y a aucune rationalité économique ou financière possible à l’octroi de l’avance, qui non seulement est à fonds perdus mais n’a pas de raison d’être ».
On rappelle que l’acte anormal de gestion est caractérisé si une société s’appauvrit à des fins étrangères à son intérêt (CE plén. 21-12-2018 no 402006, voir La Quotidienne du 5 février 2019).