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Déséquilibre significatif entre les parties : le prix « convenu » peut être contrôlé par le juge

Le Code de commerce autorise un contrôle judiciaire du prix, dès lors que celui-ci ne résulte pas d’une libre négociation et caractérise un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

Cass. com 25-1-2017 n° 15-23.547 FS-PB


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1. A la suite d’une action engagée par le ministre de l’économie, la cour d’appel de Paris condamne une centrale d’achats pour avoir soumis 46 de ses fournisseurs à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties (C. com. art. L 442-6, I-2°), les contrats-cadres régissant leurs relations imposant aux fournisseurs de verser des ristournes de fin d’année (RFA) sans contrepartie ou contrepartie réelle et de payer des acomptes de RFA dans un délai plus court que le délai de paiement des marchandises (CA Paris 1-7-2015 n° 13/19251 : RJDA 11/15 n° 784 et chron. N. Pétrignet p. 739).

La Cour de cassation vient d’approuver cette décision.

2. La centrale d’achats soutenait que l’article L 442-6, I-2° sanctionne le fait de soumettre un partenaire commercial à une « obligation » créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties. Or le simple fait d'obtenir une réduction de prix de la part de son cocontractant ne soumet ce dernier à aucune « obligation » au sens de ces dispositions.

La Cour de cassation rejette cet argument. Dans les rapports entre un fournisseur et un distributeur, le déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties s’apprécie au regard de la convention écrite prévue par l'article L 441-7 du Code de commerce. Cette convention précise les obligations auxquelles se sont engagées les parties et fixe, notamment, les conditions de l'opération de vente des produits ou des prestations de services, comprenant les réductions de prix, telles qu'elles résultent de la négociation commerciale. Au cas particulier, l'annexe des contrats-cadres stipulait que la RFA était prévue au titre des conditions de l'opération de vente, de sorte que les clauses litigieuses relevaient bien de l’article L 442-6, I-2°.

3. Par analogie avec l’article L 132-1 – devenu l'article L 212-1 – du Code de la consommation relatif aux clauses abusives entre professionnels et consommateurs, la centrale d’achats faisait par ailleurs valoir que l'appréciation du « déséquilibre significatif » ne peut pas porter sur l'adéquation du prix au bien vendu. Cette analogie était fondée sur la décision du Conseil constitutionnel considérant que la notion de déséquilibre significatif de l’article L 442-6, I-5° du Code de commerce est conforme au regard du principe de légalité des délits et des peines dans la mesure où elle renvoie à celle, suffisamment définie par la jurisprudence, qui figure au Code de la consommation (Cons. const. 13-1-2011 n° 2010-85 QPC).

La Cour de cassation considère au contraire que l’article L 442-6, I, 2° du Code de commerce autorise un contrôle judiciaire du prix, dès lors que celui-ci ne résulte pas d’une libre négociation et caractérise un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties. En effet, la similitude des notions de déséquilibre significatif figurant dans le Code commerce et le Code la consommation n’exclut pas qu’il puisse exister entre elles des différences de régime tenant aux objectifs poursuivis par le législateur dans chacun de ces domaines, en particulier quant à la catégorie des personnes qu’il a entendu protéger et à la nature des contrats concernés. Ainsi, ces dispositions, qui figurent dans une partie du Code du commerce dédiée aux pratiques restrictives de concurrence, n’excluent pas, contrairement à l'article L 212-1 du Code de la consommation, que le déséquilibre significatif puisse résulter d’une inadéquation du prix au bien vendu. En outre, la loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008 (dite « LME »), en exigeant une convention écrite qui indique le barème de prix tel qu’il a été préalablement communiqué par le fournisseur, avec ses conditions générales de vente, a entendu permettre une comparaison entre le prix arrêté par les parties et le tarif initialement proposé par le fournisseur.

Dominique LOYER-BOUEZ

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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