Une banque accorde en mars 2009 un prêt immobilier à un particulier garanti par un organisme de cautionnement. L’emprunteur adhère au contrat d’assurance de groupe souscrit par la banque. En 2012, il cesse le remboursement des échéances à la suite de son placement en longue maladie. L’assureur refuse alors la prise en charge des impayés : l’emprunteur a atteint l’âge au-delà duquel le risque de maladie n’est plus garanti. La banque prononce la déchéance du terme du prêt. Après avoir remboursé la banque, la caution assigne en paiement l’emprunteur en août 2014. Ce dernier lui oppose reconventionnellement un manquement de la banque à son devoir de l’éclairer sur l’adéquation des risques couverts à sa situation personnelle.
La cour d’appel déclare prescrite l’action en responsabilité : plus de 5 ans se sont écoulés depuis le 14 mars 2009, date de la remise de la notice d’information informant l’emprunteur des conditions générales de l’assurance.
Cassation. La Haute Juridiction rappelle tout d’abord que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par 5 ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer (C. civ. art. 2224 ; C. com. art. L 110-4).
Les Hauts Magistrats analysent ensuite la nature du dommage subi par l’emprunteur : lorsque ce dernier reproche à la banque d'avoir manqué à son obligation de l'éclairer sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d'emprunteur et d'être responsable de l'absence de prise en charge par l'assureur du remboursement du prêt, au motif que le risque invoqué n'était pas couvert, le dommage qu'il invoque consiste en la perte de la chance de bénéficier d'une telle prise en charge.
Ce dommage se réalisant au moment du refus de garantie opposé par l'assureur, cette date constitue le point de départ du délai de prescription de l'action en responsabilité exercée par l'emprunteur.
À noter : 1. Pour satisfaire à son obligation d'information, la banque ne doit pas se contenter de remettre à l’emprunteur la notice d’information. Elle est également tenue d'éclairer l'emprunteur sur l'adéquation entre les risques couverts par l'assurance de groupe et sa situation personnelle d'emprunteur (Cass. ass. plén. 2-3-2007 n° 06-15.267 : RJDA 7/07 n° 766).
2. La prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance (Cass. 1e civ. 9-7-2009 n° 08-10.820 FS-PBI : RJDA 4/10 n° 454).
La cour d’appel avait considéré que le dommage s’était manifesté dès l’obtention du crédit par l’emprunteur, qui avait été informé des conditions générales de l’assurance par la remise de la notice d’information. La chambre commerciale de la Cour de cassation est d’un tout autre avis : le dommage s’est réalisé à l’occasion du refus de prise en charge des mensualités du prêt par l’assureur.
Dans une affaire similaire, la 2e chambre civile avait déjà jugé que « le dommage résultant d'un manquement au devoir de conseil dû à l'assuré sur l'adéquation de la garantie souscrite à ses besoins se réalise au moment du refus de garantie opposé par l'assureur » (Cass. 2e civ. 18-5-2017 n° 16-17.754 F-PB : RJDA 12/17 n° 850).
Olivier DESUMEUR
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Gestion immobilière n° 20781
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