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Pas de devoir de mise en garde spécifique pour la banque qui consent un prêt in fine

Le devoir de mise en garde de la banque à l’égard d’un emprunteur non averti est identique que le prêt soit remboursable par échéances successives ou en une seule fois à la fin du prêt.

Cass. com. 8-11-2023 n° 22-13.750 F-B, X c/ Sté Crédit lyonnais


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©Gettyimages

Poursuivi en paiement d’un prêt bancaire remboursable en une seule échéance au terme convenu (prêt dit « in fine »), un emprunteur réclame à la banque des dommages-intérêts pour avoir manqué à son obligation de mise en garde. Il fait valoir qu'un prêt in fine fait naître un risque particulier, inhérent à sa nature, sur lequel le banquier doit mettre en garde l'emprunteur non averti même si, comme en l'espèce, le crédit est adapté aux capacités financières de ce dernier.

Sa demande est rejetée : que le prêt soit remboursable par échéances ou en une seule fois à la fin, l'obligation de mise en garde à laquelle peut être tenu un établissement de crédit à l'égard d'un emprunteur non averti avant de lui consentir un prêt ne porte que sur l'inadaptation de celui-ci aux capacités financières de l'emprunteur et sur le risque de l'endettement qui résulte de son octroi.

A noter :

Précision inédite. Le devoir de mise en garde de la banque à l’égard de l’emprunteur profane suppose que la banque vérifie les capacités financières de l’intéressé et l'adaptation du prêt à ces capacités (notamment, Cass. com. 1-7-2020 n° 18-21.739 F-D : RJDA 10/20 n° 521), en prenant en considération l'ensemble du patrimoine de l'emprunteur, de ses revenus et de ses charges (Cass. com. 9-11-2022 n° 21-16.030 F-D : RJDA 2/23 n° 104 ; Cass. 1e civ. 9-11-2022 n° 21-16.846 FS-B : RJDA 3/23 n° 160). Si, à la date de sa conclusion, le prêt se révèle adapté au regard des capacités financières de l'emprunteur et du risque d’endettement né du prêt, la banque n’est pas tenue de mettre en garde l’emprunteur (Cass. com. 7-7-2009 n° 08-13.536 FS-PB : RJDA 12/09 n° 1110 ; Cass. com. 18-1-2017 n° 15-17.125 F-D : RJDA 4/17 n° 271). La cour d’appel avait ici fait application de ces principes.

Le moyen invoqué par l’emprunteur devant la Cour de cassation tendait à faire évoluer cette jurisprudence par la reconnaissance d’un risque accru en cas de prêt intégralement remboursable en une seule fois et, en conséquence, d’un devoir de mise en garde spécifique à ce type de prêt. La Haute Juridiction s’y refuse et confirme que l’appréciation du devoir de mise en garde de la banque reste identique que le prêt soit remboursable par échéances successives ou in fine. La solution est pragmatique et évite de compliquer le débat.

Le manquement de la banque à son devoir de mise en garde fait perdre à l’emprunteur une chance d’éviter le risque d’endettement excessif né de l’octroi du prêt, la réalisation de ce risque supposant que l’emprunteur ne soit pas en mesure de faire face au paiement des sommes exigibles au titre du prêt (Cass. com. 13-2-2019 n  17-14.785 FS-PB : RJDA 5/19 no 366 : BRDA 6/19 inf. 19). Le prêt « in fine » comporte à cet égard une spécificité : ce risque ne se réalise qu’au terme du prêt, à la date de l’échéance unique que l’emprunteur ne peut pas honorer (arrêt précité) et cette date constitue le point de départ du délai de prescription pour agir en responsabilité contre la banque (Cass. com. 6-3-2019 no 17-22.668 FS-PB : BRDA 8/19 inf. 12). Tel n’est pas le cas pour un prêt amortissable classique (en dernier lieu, Cass. com. 8-11-2023 n° 22-13.191 F-D).

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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