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Directive CSRD : la Commission européenne publie un jeu de questions-réponses

Pour aider les sociétés à se conformer à leurs obligations d'établir et faire certifier des informations de durabilité issues de la directive « CSRD », la Commission européenne a publié une communication qui explicite ce dispositif sous forme d’une foire aux questions. Focus sur les points principaux.

Communication UE C/2024/6792 : JOUE du 13-11-2024


Par Valentine OBLIN
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©Getty Images

On le sait, la directive européenne 2022/2464 du 14 décembre 2022, dite « CSRD », transposée dans notre droit en décembre 2023, impose aux grandes entreprises, aux sociétés mères de grands groupes, aux petites et moyennes entreprises cotées sur un marché réglementé et à certaines entreprises de pays tiers (ou leur filiale) d’établir des « informations de durabilité » sur les enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance et de faire certifier ces informations selon un calendrier d'entrée en vigueur progressive (Ord. 2023-1142 du 6-12-2023 et Décret 2023-1394 du 30-12-2023 : BRDA 8/23). Cette directive a été complétée de normes dites « ESRS » qui fixent les informations que les grandes entreprises et sociétés mères de grands groupes doivent publier (Règl. délégué UE 2023/2772 du 31-7-2023).

Les informations de durabilité doivent figurer dans une section spécifique du rapport de gestion ou du rapport sur la gestion du groupe, appelée, depuis un rectificatif aux normes ESRS, « état de durabilité » (Règl. délégué UE 2023/2772, annexe I, ESRS 1 § 110 rectifié le 31-7-2023) ou, lorsqu’elles concernent une entreprise de pays tiers, dans un « rapport relatif aux enjeux de durabilité ».

La Commission européenne a publié des explications sur ce dispositif sous forme de réponses à des questions fréquentes. Parmi les 90 réponses que contient ce document, nous présentons celles qui ont particulièrement retenu notre attention.

Reporting de durabilité au sein des groupes de sociétés 

Les sociétés qui dépassent les seuils leur imposant d’établir un état de durabilité peuvent en être dispensées si elles sont contrôlées par une société consolidante qui les inclut dans des informations de durabilité consolidées. Cette dispense est soumise à diverses conditions. La société contrôlée doit notamment inclure dans son rapport de gestion ou son rapport sur la gestion du groupe un lien vers le site internet sur lequel le rapport comprenant les informations de durabilité consolidées est publié (C. com. art. L 232-6-3, V et L 233-28-4, V issus de ord. 2023-1142 et art. R 232-8-5, IV et R 233-16-4 issus du décret 2023-1394, en vigueur à compter du 1-1-2025). Toutefois, il peut arriver que ce dernier ne soit pas encore disponible au moment où la société publie son rapport de gestion.

Dans ce cas, estime la Commission européenne, la société contrôlée peut mentionner un site internet général où ce rapport sera disponible à l’avenir. Elle peut aussi envisager de publier avec son propre rapport de gestion une déclaration de la société mère dans laquelle celle-ci s’engage à publier les informations de durabilité sur ce site (point 20).

Par ailleurs, la Commission revient sur le rapport consolidé sur les enjeux de durabilité qui doit être publié par la filiale européenne d’une société établie dans un pays hors de l’Union européenne (UE) ou de l’Espace économique européen (EEE) si certaines conditions sont remplies.

Pour la Commission, le rapport ne doit pas nécessairement être établi par la filiale européenne, celle-ci n’ayant que l’obligation de le rendre public (cf. C. com. L 233-28-5, I issu de ord. 2023-1142, en vigueur à compter du 1-1-2025). La filiale peut néanmoins le préparer elle-même (point 42).

Pour éviter que le rapport consolidé sur les enjeux de durabilité soit publié par plusieurs filiales (ou succursales) d’un même groupe, la Commission estime que les Etats membres de l'UE peuvent autoriser une filiale à ne publier qu’un lien vers le rapport publié par une autre filiale (point 43). La France n’a pas fait usage de cette possibilité : l’obligation de publier un tel rapport pèse en effet sur « toute société contrôlée » par la société établie hors de l’UE ou de l’EEE qui répond à la catégorie des grandes entreprises ou, si ses titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, des petites et moyennes entreprises (C. com. art. L 233-28-5, I-al. 1 et L 22-10-36, II en vigueur à compter du 1-1-2025). Rappelons que ce rapport doit être déposé au greffe dans un délai de 12 mois à compter de la clôture de l’exercice pour être annexé au registre du commerce et des sociétés et au registre national des entreprises (C. com. art. R 232-25, en vigueur à compter du 1-1-2025, et L 123-37).

Données « taxonomie » et ressources incorporelles essentielles

La Commission revient sur les informations environnementales que les sociétés de l'UE doivent établir en application du règlement UE 2020/852 du 18 juin 2020 dit « règlement taxonomie » et de ses actes délégués (Règl. 2020/854 art. 8). Ces données doivent figurer au sein de l’état de durabilité (Règl. délégué UE 2023/2772, annexe I, ESRS 1 § 113).

La Commission précise – ce qui est nouveau - que les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé qui sont des petites et moyennes entreprises n’auront pas à publier les données taxonomie au titre des exercices 2026 et 2027 si elles choisissent de ne pas publier d’informations de durabilité pour ces exercices comme elles y sont autorisées (point 33). Cette interprétation, qui  ne découle pas directement des textes, est également celle que nous avons retenue dans notre Mémento Sociétés commerciales (n° 76972).

Outre les informations de durabilité et les données taxonomie, les grandes entreprises et les petites et moyennes entreprises « cotées » sur un marché réglementé devront aussi faire figurer dans leur rapport de gestion des informations sur leurs ressources incorporelles essentielles (C. com. art. L 232-1, II-7° et L 22-10-35 modifiés par ord. 2023-1142, en vigueur à compter du 1-1-2025). 

La Commission souligne que ces informations doivent porter sur toutes les ressources incorporelles essentielles de l’entreprise, y compris celles qui sont comptabilisées au bilan ; pour la Commission, une telle approche globale aidera les utilisateurs à évaluer la valeur de marché de l’entreprise (point 83). Les informations sur les ressources incorporelles essentielles ne doivent pas nécessairement figurer dans l’état de durabilité, mais elles peuvent être présentées dans une autre partie du rapport de gestion (point 81).

Format et balisage des informations de durabilité

Les sociétés qui doivent intégrer des informations de durabilité dans leur rapport de gestion ou leur rapport de gestion consolidé doivent établir ce dernier sous le format d’information électronique européen unique (Esef) prévu par le règlement européen 2019/815 du 17 décembre 2018 (c’est-à-dire en XHTLM). Elles doivent par ailleurs appliquer des balises sur leurs informations de durabilité et les données taxonomie conformément à ce règlement, qui doit être complété à cette fin.  

Dans l’attente de la publication de ce texte modificateur, ces exigences ne s’appliquent pas, indique la Commission européenne (point 38). 

Rappelons toutefois que les sociétés dont les titres sont cotés sur un marché réglementé et qui doivent publier un rapport financier annuel doivent d’ores et déjà établir le rapport de gestion inclu dans ce dernier sous le format Esef.

Certification des informations de durabilité 

Dans la définition qu’ils donnent du prestataire de services d’assurance indépendant, les textes européens précisent qu’il s’agit d’un « organisme » (Directive CE 2006/43 art. 2, 23 et Directive UE 2013/34 art. 2, 20).

Pour la Commission, le terme « organisme » devrait être interprété comme incluant le cas des personnes physiques afin de garantir des conditions de concurrence équitables entre les prestataires de services d’assurance indépendants et les contrôleurs légaux des comptes. Par conséquent, les personnes physiques devraient pouvoir être agréées en qualité de prestataire de service d’assurance indépendant (point 60).

Rappelons qu’en France les prestataires de services d’assurance indépendants sont désignés sous le vocable d’« organismes tiers indépendants » (OTI). L’article L 822-1 du Code de commerce définit les OTI comme des personnes morales accréditées par le Cofrac et précise que la mission de certification des informations de durabilité doit être réalisée par un auditeur des informations de durabilité, personne physique également accréditée par le Cofrac, associée, actionnaire, dirigeante, y compris comme membre d'un organe de gestion, d'administration ou de surveillance, ou salariée de cet OTI.

Par ailleurs, on le sait, l'audit des informations de durabilité doit être effectué, dans un premier temps, selon une norme d'assurance limitée (Dir. UE 2022/2464 du 14-12-2022 considérant 60) mais cette vérification pourrait, dans le futur, être renforcée pour permettre l'émission d'une assurance raisonnable (même niveau d'assurance que pour la certification des comptes).

Pour la Commission, la directive CSRD n’interdit pas à une société de décider volontairement de demander un avis sur la base d’une assurance raisonnable sur l’ensemble ou certaines parties de l’information de durabilité dès lors qu’une norme d’assurance raisonnable prévoit un niveau d’assurance plus élevé qu’une mission d’assurance limitée. Elle ajoute que cette décision revient à la société et non au vérificateur des informations de durabilité (point 76).

Enfin, la Commission précise que la directive CSRD ne réglemente pas la publication volontaire d’informations de durabilité et que, en conséquence, une société établissant volontairement de telles informations n’est pas tenue de les faire certifier (point 77).

© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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