Deux femmes ayant chacune un enfant souhaitent consentir à l’autre une délégation d’autorité parentale. Les juridictions françaises refusent faute de circonstances particulières rendant nécessaires ces délégations (Cass. 1e civ. 8-7-2010 n° 09-12.623 FS-PBI : BPAT 5/10 inf. 270). Les requérantes soutiennent alors subir une discrimination en raison de leur orientation sexuelle, en violation de l’interdiction de la discrimination (Conv. EDH art. 14) et du droit au respect de la vie privée et familiale (Conv. EDH art. 8).
Pour la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH), une telle violation n’existe pas :
- les intéressées se trouvent dans une situation comparable à celle d’un couple hétérosexuel dans le cadre d’une famille recomposée lorsque le ou la partenaire du parent vit sans lien biologique avec un enfant qu’il élève ;
- les règles sur la délégation d’autorité parentale ne contiennent aucune distinction quant à l’orientation sexuelle du déléguant ou du délégataire (C. civ. art. 377) ;
- les juges statuent en la matière en se fondant sur les circonstances de fait de chaque affaire, notamment l’état de santé de la mère ou de l’enfant, les déplacements ou les contraintes professionnelles. En l’espèce, ils ont constaté que les conditions pour une délégation n’étaient pas réunies.
A noter : 1. La Cour de cassation admet la délégation de l'autorité parentale dans le cadre d'un couple homosexuel (Cass. 1e civ. 24-2-2006 n° 04-17.090 : Bull. civ. I n° 101 ; Cass. 1e civ. 16-4-2008 n° 07-11.273 : Bull. civ. I n° 106). Elle veille seulement, comme en présence d’un couple hétérosexuel, à ce que les conditions requises pour une telle délégation soient remplies.
2. Après l’arrêt de la Cour de cassation de 2010, les requérantes se sont séparées. Voulant néanmoins conforter leur rôle respectif auprès de chacun des enfants, l’une a fait une demande en adoption tandis que l’autre a sollicité à nouveau le bénéfice d’une délégation d’autorité parentale. Les juridictions françaises n’ayant pas encore statué sur ces procédures, la CEDH a considéré qu’il était prématuré qu’elle se prononce.
Dominique CHAMINADE
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Famille n° 38411