Une charte commune sur le divorce par consentement mutuel a été signée le 23 décembre 2020 par David Ambrosiano, Président du Conseil supérieur du notariat (CSN), et Christiane Féral-Schuhl, présidente du Conseil national des barreaux (CNB). Ce texte a notamment « pour objectif de permettre une collaboration fluide et efficace entre les professionnels impliqués » et de rappeler « les droits et obligations qui pèsent sur chacun ». Tour d'horizon des principales dispositions intéressant les professionnels.
La charte rappelle tout d'abord les obligations qui pèsent sur tout avocat rédacteur d'acte et, en particulier, qu'il est « essentiel » que celui qui signe la convention en soit le rédacteur : il n'est donc pas possible pour l'avocat rédacteur de se faire remplacer par un confrère lors de la signature de la convention. La charte confirme, par ailleurs, que cette signature « doit être effectuée, en présence physique et simultanément, par les parties et les avocats rédacteurs ».
Afin d'éviter les conflits d'intérêt, la charte précise également qu'il est interdit à 2 avocats d'assister les époux pour la rédaction de la convention de divorce, lorsqu'ils sont membres d'un même cabinet, associés ou collaborateurs :
- soit membres d'une même structure (société civile de moyens, cabinet groupé, etc.) ;
- soit exerçant dans les mêmes locaux, même en l'absence de structure existante.
De façon générale, il est également interdit à tout avocat qui a reçu les 2 époux d'être l'avocat d'un seul.
S'agissant du notaire, il est rappelé que l'officier ministériel ne remplace pas le juge : il ne prononce pas le divorce mais le constate et procède au dépôt de la convention au rang des minutes de son office ce qui donne date certaine et force exécutoire au divorce. Le contrôle du notaire est un contrôle formel de la convention de divorce et porte sur les mentions obligatoires requises par la loi (C. civ. art. 229-3). Le notaire doit par ailleurs s'assurer que :
- le délai de réflexion a bien été respecté et que la convention de divorce n'a pas été signée avant l'expiration du délai (C. civ. art. 229-1) ;
- l'acte qu'il dépose n'est pas contraire à l'ordre public ; un tel contrôle ne signifiant pas qu'il soit tenu de vérifier le caractère équilibré, équitable ou pertinent de la convention qui est garanti par l'intervention des 2 avocats.
La convention de divorce doit comporter l’état liquidatif du régime matrimonial (C. civ. art 229-3, 5°). Le Code civil n'exigeant pas que « le sort des droits et obligations constatés par cet état soit fixé par les époux », il n'est pas nécessaire, souligne la charte, que l'état liquidatif soit suivi d'un partage ou d'une convention d'indivision.
L'état liquidatif doit être fait en la forme notariée lorsque « la liquidation porte sur des biens soumis à publicité foncière » (C. civ. art 229-3, 5°). Plus précisément, l'état liquidatif doit être fait par acte notarié lorsqu'il est accompagné d'un acte réglant le sort d'un droit réel : liquidation partage avec transfert ou démembrement des biens immobiliers, liquidation avec convention d'indivision sur des biens immobiliers, par exemple. Dans cette hypothèse, l'acte liquidatif notarié comprendra soit l'intégralité de la liquidation, soit la liquidation sur les biens soumis à publicité foncière. En revanche, lorsque l'acte effectue des comptes affectés par la présence d'un bien immobilier ou d'un droit réel, mais n'aboutit pas à un partage ou une convention d'indivision (en cas de calcul des récompenses consécutifs au financement de biens immobiliers propres par des fonds communs ou des biens immobiliers communs par des fonds propres, par exemple), l'état liquidatif peut être fait par acte sous signature privée.
La loi n'indique pas s'il est possible, ou non, de faire signer, avant l'expiration du délai de réflexion des époux, l'acte liquidatif définitif sous condition suspensive du dépôt de la convention de divorce et de ses annexes aux rangs des minutes de l'office notarial. La charte préconise plutôt de joindre au projet de convention du divorce un projet d'acte liquidatif afin que le délai de réflexion s'applique tant au principe qu'aux conséquences pécuniaires du divorce et ce, même si l'acte liquidatif est fait en la forme authentique. Les professionnels rejoignent ainsi la recommandation de la Chancellerie (Rép. Viry : AN 24‑12‑2019 no 19958 : BPAT 1/20 inf. 5).
Les pratiques locales qui se sont développées pour organiser un rendez-vous commun de signature de la convention et de ses annexes avec les avocats et le notaire sont ainsi « tout à fait pertinentes ». Toutefois, « une signature en deux temps après l'écoulement du délai de réflexion ne pose aucune difficulté ».
Concernant plus particulièrement le délai de réflexion de 15 jours (C. civ. art. 229-4), la charte confirme que si un changement significatif a été apporté à la convention et/ ou à l'état portant liquidation du régime matrimonial, il est impératif de faire courir un nouveau délai de réflexion et la convention ne pourra être signée qu'après expiration de ce nouveau délai.
Enfin, en présence d’éléments d'extranéité (nationalité étrangère des époux, lieux de résidence situés dans des États différents, par exemple), la charte souligne qu'il peut être « opportun de déconseiller aux époux d'avoir recours à ce type de divorce » ou « de les mettre expressément en garde sur les difficultés que ce type de divorce peut présenter ». En effet, si certains États se sont montrés conciliants pour accepter le divorce par consentement mutuel extra-judiciaire, d'autres refusent de lui faire produire ses effets.
Olivier DESUMEUR
Pour en savoir plus sur cette question, voir Mémento Droit de la famille n°s 9012 s.