Le divorce par consentement mutuel sans juge entrera en vigueur le 1er janvier 2017, les procédures en cours à cette date restant judiciaires dès lors que la requête en divorce par consentement mutuel aura été déposée avant le 1er janvier (Loi art. 114 V).
Champ d'application
Aux quatre procédures de divorce existantes, il en est ajouté une cinquième, non juridictionnelle : le divorce par consentement mutuel contractuel (C. civ. art. 229 modifié).
Cette voie est ouverte à tous les époux qui s’accordent sur le principe et les conséquences de la rupture. Par exception, elle est exclue dans deux cas (C. civ. art. 229-2 nouveau) :
- l’un des enfants mineurs du couple demande à exercer son droit à être entendu par le juge. Le divorce par consentement reste alors possible, mais selon la procédure judiciaire actuellement en vigueur ;
- l’un des époux fait l’objet d’une mesure de protection. Rappelons que dans ce cas, le divorce par consentement mutuel, même judiciaire, est exclu (C. civ. art. 249-4).
Corrélativement, le divorce par consentement mutuel par voie judiciaire n’est possible qu’en présence d’un enfant mineur qui demande à être entendu (C. civ. art. 230 modifié).
Autrement dit, les époux n’ont pas de choix : s’ils veulent divorcer par consentement mutuel, ce sera nécessairement sans le contrôle d’un juge dès lors qu’ils n’ont pas d’enfant mineur ou que ceux-ci ne demandent pas à être entendus.
Les règles des passerelles entre divorces contentieux et consentement mutuel sont aménagées pour permettre, en cours de procédure, d’opter pour un consentement mutuel qui sera contractuel ou judiciaire selon la distinction précédemment indiquée (C. civ. art. 247 modifié).
Modalités
Assistance des époux. Les avocats tiennent un rôle central dans cette procédure contractuelle.
Chacun des époux devra avoir son propre conseil (C. civ. art. 229-1 nouveau). L’un et l’autre ne pourront plus être assistés par le même avocat, comme c’est actuellement le cas dans 80 % des divorces par consentement mutuel. Les modalités de la rupture prévues par les intéressés n’étant plus contrôlées par le juge, le législateur a tablé sur l’intervention de deux conseils pour en garantir l’équilibre.
Convention de divorce. L’accord sur la rupture et ses effets est formalisé dans une convention qui comporte obligatoirement certaines mentions (C. civ art. 229-3 nouveau). Doivent ainsi être indiqués :
- l’état civil complet des époux et celui de leurs enfants ;
- l’identité des avocats ainsi que la structure dans laquelle ceux-ci exercent. Cette précision a vocation à rendre apparent l'éventuel conflit d'intérêts qui existerait s’ils appartenaient à la même structure d'exercice ;
- la mention de l’accord des époux sur la rupture du mariage et sur ses effets tels que définis dans leur convention (C. civ. art. 229-3, al. 1 nouveau). En effet, ce consentement ne se présume pas ;
- les modalités du règlement complet des effets du divorce, notamment s’il y a lieu au versement d’une prestation compensatoire ;
- l’état liquidatif du régime matrimonial, le cas échéant en la forme authentique devant notaire lorsque la liquidation porte sur des biens soumis à publicité foncière, ou la déclaration qu’il n’y a pas lieu à liquidation.
La convention de divorce doit aussi nécessairement préciser que les enfants mineurs ont été informés par leurs parents de leur droit à être entendus par le juge et qu’ils ne souhaitent pas faire usage de cette faculté (C. civ. art. 229-3 nouveau).
Il s’agit de s’assurer que la contractualisation du divorce ne se fait pas au détriment du droit des enfants. Dans le cadre d’une procédure judiciaire, il appartient au juge de s’assurer que les mineurs ont été informés de leur droit à être entendu et à être assistés d’un avocat (C. civ. art. 388-1). En outre, à l’occasion d’un divorce par consentement mutuel, le juge « peut refuser l'homologation et ne pas prononcer le divorce s'il constate que la convention préserve insuffisamment les intérêts des enfants ou de l'un des époux » (C. civ. art. 232).
Désormais, l’information des mineurs est mise à la charge des parents, ces derniers devant attester, dans la convention, avoir rempli leur obligation.
Le défaut de l’une des mentions précitées est sanctionné par la nullité de la convention (C. civ. art. 229-3 nouveau). Il doit aussi conduire tout notaire à refuser d’enregistrer l’acte, le privant ainsi de force exécutoire.
Délai de réflexion. Une fois les modalités du divorce finalisées, les époux disposent d’un temps de réflexion (C. civ. art. 229-4 nouveau). Pour le faire courir, chaque avocat adresse à son client le projet de convention, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
A compter de la réception, un délai de quinze jours s’ouvre durant lequel les époux ne peuvent pas signer la convention. Faute de respecter ce délai, la convention est nulle.
Formalisme. La convention prend la forme d’un acte sous signature privée contresigné par avocats (C. civ. art. 229-1 nouveau).
Conformément au droit commun de ce type d’acte, il fait foi de l’écriture et de la signature des intéressés, tant à leur égard qu’à celui de leurs héritiers ou ayants cause (C. civ. art. 1374). En outre, en contresignant l’acte, l’avocat atteste avoir éclairé pleinement la partie qu’il conseille sur les conséquences juridiques de cet acte.
La convention est déposée au rang des minutes d’un notaire. Ce dernier contrôle que toutes les mentions prescrites à peine de nullité y figurent et que le délai de réflexion a bien été respecté.
Il n’est donc tenu que d’un contrôle formel, se limitant à un rôle d’enregistrement. Autrement dit, il semble qu’il ne pourrait pas refuser son concours pour des motifs d'ordre public ou des motifs tirés d'illégalités autres que formelles. Seuls les avocats assumeraient la responsabilité d'un mauvais conseil.
Le coût de cet enregistrement serait fixé, selon le garde des Sceaux à 50 € (Débats AN 1 Rapport n° 3726 art. 17 ter).
Le dépôt au rang des minutes donne ses effets à la convention en lui conférant date certaine et force exécutoire (C. civ. art. 229-1 nouveau).
Effets du divorce contractuel
Les effets d’un divorce purement contractuel sont, en tous points, identiques à ceux d’un consentement mutuel judiciaire, à quelques adaptations nécessaires près.
Ainsi, la dissolution du mariage entre les époux prend effet à la date à laquelle la convention acquiert force exécutoire (C. civ. art. 260 modifié), soit à la date à laquelle elle a été déposée au rang des minutes du notaire.
S’agissant de leurs biens, le divorce prend effet à cette même date, à moins que la convention n’en stipule autrement (C. civ. art. 262-1 modifié).
A l’égard des tiers, le régime du divorce contractuel s’aligne sur l’existant : la convention est opposable aux tiers, en ce qui concerne les biens des époux, à compter de l’accomplissement de transcription du divorce sur les actes d’état civil (C. civ. art. 262 modifié).
Dominique CHAMINADE
Pour en savoir plus sur la portée pratique de cette réforme et sur le rôle de l'avocat et du notaire : voir Bulletin du patrimoine 1/17 à paraître.