Des époux consentent une donation-partage au profit de leurs deux fils. Après leur décès, l'un des enfants estime que les biens immobiliers attribués à son frère ont été sous-évalués. Il agit en réduction de la donation-partage et produit un rapport d'expertise donnant une nouvelle évaluation des biens à la date de la donation-partage.
La cour d'appel rejette sa demande. Selon elle, cette évaluation n'est pas conforme : l'article 1078 du Code civil ne s'appliquant pas à l'action en réduction, les biens devaient être évalués à la date d'ouverture de la succession conformément au droit commun des donations.
La Cour de cassation censure l'arrêt d'appel : en cas d'action en réduction, l'article 1078 prévoit une évaluation des biens au jour de la donation-partage et n'impose pas de retenir celle figurant dans l'acte.
à noter : Revirement de jurisprudence.
Rappelons que la donation-partage est un acte qui réalise un partage anticipé de succession. Conséquence : pour le calcul de la réserve, la date d'évaluation des biens donnés ou incorporés à l'acte est définitivement fixée au jour de la donation-partage, et non à l'époque du partage, "à condition que tous les héritiers réservataires vivants ou représentés au décès de l'ascendant aient reçu un lot dans le partage anticipé et l'aient expressément accepté, et qu'il n'ait pas été prévu de réserve d'usufruit portant sur une somme d'argent" (C. civ. art. 1078).
Selon la lettre de l'article 1078 du Code civil, l'évaluation au jour de la donation-partage ne concerne pas le calcul de l'indemnité de réduction. La Cour de cassation estimait que cette indemnité devait se calculer d'après la valeur des biens à l'époque du partage et leur état au jour où la donation avait pris effet (Cass. 1e civ. 17-12-1996 : Bull. civ. I n° 462).
Dans l'arrêt commenté, la Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence : elle admet qu'en cas d'action en réduction d'une donation-partage, l'indemnité se calcule d'après la valeur du bien au jour de la donation-partage. Mais elle retient que l'estimation portée dans l'acte ne s'impose pas.
En pratique : Les héritiers peuvent prouver que la valeur indiquée dans l'acte de donation-partage n'est pas conforme à la réalité de l'époque. Ils sont autorisés à produire une nouvelle estimation, qui doit se faire selon la valeur du bien à l'époque de la donation-partage.
Pour en savoir plus sur la donation-partage : Mémento Droit de la famille, éd. Francis Lefebvre 2014-2015, n° 63620.