Un époux, commun en biens, consent sur ses gains et salaires une donation à deux des enfants issus de son mariage. Après divorce, son ex-femme demande qu’il soit déclaré redevable d’une récompense en raison de cette donation.
La cour d’appel relève que l’épouse était présente à l’acte notarié et ne s’est pas opposée à la donation. Elle en conclut qu’elle y avait consenti et que l’époux ne devait donc pas récompense à la communauté.
La Cour de cassation confirme.
A noter : un conjoint peut librement disposer de ses gains et salaires après s’être acquitté des charges du mariage (C. civ. art. 223). L’accord de l’épouse n’était donc pas nécessaire à la validité de la donation consentie par le mari (voir en ce sens notamment Cass. 1e civ. 14-11-2007 n° 06-21.691 : BPAT 1/08 inf. 7). Il reste que les revenus d’activité sont des acquêts (C. civ. art. 1401). A ce titre, leur titulaire doit-il une récompense s’il en prive la communauté via une donation ? La réponse est la même que s’il s’agissait de biens communs ordinaires. Dans ce cas, la donation faite à un enfant commun par un époux avec le consentement de son conjoint ne donne pas lieu à récompense, sauf si le donateur a déclaré, en la constituant, qu’il la prendrait à sa charge (C. civ. art. 1439 ; Cass. 1e civ. 22-6-2004 n° 01-18.030 : Bull. civ. I n° 173). C’est bien la solution appliquée en l’espèce : l’épouse ayant consenti à la donation par son époux de ses gains et salaires, il n’y a pas lieu à récompense. Le consentement du conjoint peut être exprès ou tacite, aucun formalisme particulier n’étant requis. Il a été jugé que l’accord ne peut pas être déduit de l’attitude purement passive de celui qui assiste à des pourparlers (Cass. 1e civ. 31-3-2010 n° 08-19.649 : BPAT 3/10 inf. 151). Mais la situation était différente dans l’affaire rapportée : la femme était présente non pas à un rendez-vous préparatoire mais le jour de l’acte de donation ; et elle a été, à l’évidence, informée et mise en mesure de s’opposer à l’opération puisque celle-ci s’est réalisée devant notaire. Dans ces circonstances, l’absence d’opposition de l’épouse a permis de conclure à son accord tacite. On notera que certains auteurs ont pris une position inverse et considèrent que, pour exclure toute récompense en cas de donation de gains et salaires à un enfant commun, le consentement du conjoint doit être exprès ; le pouvoir de disposition exclusif d’un époux sur ses gains et salaires priverait de toute signification l’attitude simplement passive de son conjoint (B. Vareille : Rép. Civ. Dalloz, v. Communauté légale 5° Liquidation et partage, n° 201).
Claire BABINET
Pour en savoir plus sur les récompenses dues par l'un des époux à la communauté : voir Mémento Droit de la famille n° 3905