Le propriétaire de plusieurs lots dont l’un à usage de piscine a été condamné à procéder à l’entretien et à l’exploitation de la piscine conformément aux termes d’une convention signée le 20 août 1970 valant « additif au règlement de copropriété ». L’auteur de cette convention s’y était engagé à assumer les frais de fonctionnement de la piscine et à autoriser son accès gratuit à tous les copropriétaires au moins pendant les vacances. Le propriétaire assigne le syndicat des copropriétaires afin qu'il soit constaté que cette convention a pris fin à l’expiration d’un délai de trente ans, soit le 20 août 2000, au motif que le droit réel ainsi créé ne peut être perpétuel.
La cour d’appel rejette cette demande.
La Cour de cassation confirme, par un motif substitué : est perpétuel le droit réel attaché à un lot de copropriété conférant à ce lot jouissance spéciale d’un autre lot.
A noter : confirmation de jurisprudence.
La Cour de cassation affirme régulièrement que le droit de jouissance privatif sur une partie commune d’un immeuble en copropriété est un droit réel et perpétuel (Cass. 3e civ. 24-10-2007 n° 06 19.260 : BPIM 6/07 inf. 430 ; Cass. 3e civ. 2-12-2009 n° 08-20.310 : BPIM 1/10 inf. 49 ; Cass. 3e civ. 6-5-2014 n° 13 16.790 ; Cass. 3e civ. 25-2-2016 n° 15 13.105 ; Cass. 3e civ. 15-12-2016 n° 15 22.583 : BPIM 1/17 inf. 47).
En l’espèce, le droit en cause n’était pas un droit de jouissance exclusif sur une partie commune, mais un droit en quelque sorte inverse : un droit de jouissance accordé aux autres copropriétaires sur la partie privative d’un autre lot. Il s’agit dans les deux cas d’un droit de jouissance spéciale attaché à un lot de copropriété, et il est donc logique de leur appliquer le même régime. Mais lequel ?
L’affirmation du caractère perpétuel de ce droit pouvait-elle perdurer après l’arrêt rendu le 8 septembre 2016 (Cass. 3e civ. 8-9-2016 n° 14-26.953 FS-PB : Bull. civ. III n° 105) ? Dans cet arrêt la Cour de cassation a retenu que le droit réel de jouissance spéciale, accordé pour la durée de vie d’une personne morale, n’était pas perpétuel. La cour d’appel, appliquant ce raisonnement, a dans l'arrêt ici évoqué retenu que le droit de jouissance spéciale accordé sur ce lot de copropriété était un droit réel sui generis qui, sans être perpétuel, pourrait s’exercer aussi longtemps que l’immeuble serait soumis au statut de la copropriété. Le pourvoi a été rejeté, mais par un motif substitué : le droit réel attaché à un lot de copropriété conférant à ce lot le bénéfice d’une jouissance spéciale d’un autre lot est un droit perpétuel. Dans cet arrêt de principe, la Cour de cassation réaffirme donc avec force, que le droit de jouissance spéciale attachée à un lot de copropriété s’exerce, comme en l’espèce, sur la partie privative d’un autre lot, ou, comme dans le cas le plus fréquent, sur des parties communes de l’immeuble.
Anne-Lise COLLOMP, Conseiller référendaire à la Cour de cassation
Pour en savoir plus sur le droit de jouissance des parties communes : voir Mémento Gestion immobilière nos 35565 s.