Une femme a une fille (sans filiation paternelle déclarée) qu’elle élève avec sa compagne. Le couple se sépare deux ans plus tard. L’ex-compagne réclame un droit de visite sur l’enfant, ayant résidé de manière stable avec elle, pourvu à son éducation et noué des liens affectifs durables (C. civ. art 371-4, al. 2).
Ce droit lui est accordé par la cour d’appel pour les motifs suivants :
- il existait entre les deux femmes un projet parental commun au moment de la conception de l’enfant ;
- la requérante a, pendant plus de deux ans, vécu avec la mère et l’enfant qu’elle considérait comme sa fille, de sorte qu’il existait un lien affectif durable entre elles, dont la rupture n’est due qu’au refus de la mère de maintenir cette relation ;
- il est de l’intérêt de l’enfant d’avoir accès à son histoire (circonstances exactes de sa conception, de sa naissance et premiers temps de son existence), sans que cela n'empêche une relation affective de qualité avec l'actuel compagnon de sa mère ;
- l'existence de relations conflictuelles entre la mère et son ex-compagne n'est pas un obstacle suffisant pour justifier le rejet de la demande, dès lors que l’enfant, décrite comme épanouie et équilibrée, est en mesure de renouer des liens affectifs avec cette dernière ;
- la demande présentée par l’ex-compagne, qui ne sollicite qu’un droit de visite, en proposant de se déplacer pour voir l’enfant, témoigne de l’intérêt qu’elle porte à celle-ci et de son souhait de ne pas brusquer la mineure en reprenant de manière progressive des contacts avec elle, avant de pouvoir à nouveau la recevoir à son domicile.
La Cour de cassation confirme la décision. La cour d’appel a statué en considération de l’intérêt supérieur de l’enfant, qui doit être une considération primordiale dans toutes les décisions qui le concernent et que les juges du fond ont souverainement apprécié (C. civ. art. 371-4, al. 2 ; Conv. de New-York du 20-11-1989 art. 3 §1).
A noter : le « parent social », notamment au sein des familles homoparentales comme en l’espèce, a désormais sa place. Spécialement depuis 2013, les juge sont invités à prêter une oreille attentive au tiers qui a résidé de manière stable avec l’enfant et l'un de ses parents, a pourvu à son éducation, à son entretien ou à son installation et a noué avec lui des liens affectifs durables (C. civ. art. 371-4 issu de la loi 2013-404 du 17-5-2013). Et ils le font effectivement puisqu’ils accordent très régulièrement un droit de visite et d’hébergement à l’ex-compagne (ou compagnon) du parent biologique dès lors que ce droit répond à l’intérêt supérieur de l’enfant.
Florence GALL-KIESMANN
Pour en savoir plus sur ces questions : voir Mémento Droit de la famille n° 38030