Après la rupture d’un contrat d’agence commerciale par le mandant, une cour d’appel limite le montant de l’indemnité due par le mandant à l’agent aux motifs que ce dernier n’était pas lié par une clause de non-concurrence, qu’il avait retrouvé un emploi dans la même branche presque immédiatement et qu’il ne produisait aucun élément sur les commissions qu’il avait perçues depuis la rupture du contrat.
Cette décision est censurée par la Cour de cassation. En cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi (C. com. art. L 134-12, al. 1). Il en résulte que la cessation du contrat d'agence commerciale donne droit à réparation du préjudice résultant, pour l'agent commercial, de la perte pour l'avenir des revenus tirés de l'exploitation de la clientèle commune. Il n'y a donc pas lieu, aux fins d'évaluer ce préjudice, de tenir compte des circonstances postérieures à la cessation du contrat telles que la conclusion par l'agent d'un nouveau contrat en vue de prospecter la même clientèle pour un autre mandant.
A noter :
L'article L 134-12 du Code de commerce ne précise pas les modalités de calcul de l'indemnité destinée à compenser le préjudice subi par l'agent commercial du fait de la rupture du contrat, pas plus qu’il ne distingue selon que le contrat rompu est ou non à durée déterminée.
Le préjudice à réparer consiste en la perte par l’agent pour l'avenir des revenus tirés de l'exploitation de la clientèle commune (Cass. com. 23-4-2003 n° 01-15.639 FS-PB : RJDA 10/03 n° 940 ; Cass. com. 16-11-2022 n° 21-10.126 FS-B). Si le contrat rompu était à durée déterminée, est indemnisée la perte des commissions jusqu’au terme du contrat, tel qu’initialement convenu par les parties (Cass. com. 23-4-2003 précité). Si le contrat était à durée indéterminée, les juges évaluent l’indemnité compensatrice en fonction des usages, de la durée des relations et du montant des commissions perçues durant le contrat (Cass. com. 18-5-2010 n° 09-15.023 F-D ; CA Versailles 7-1-2010 n° 08/7984 : RJDA 5/10 n° 521), ce qui peut conduire les juges à écarter toute indemnité si le contrat n’a jamais donné lieu au paiement de commissions (Cass. com. 4-11-2014 n° 13-18.024 F-PB : Bull. civ. IV n° 155, accordant toutefois des dommages-intérêts à l’agent dont l’activité avait été entravée par le mandant). Mais, comme le rappelle ici la Cour de cassation, l’indemnité ne saurait être réduite au motif que l’agent a, postérieurement à la rupture du contrat, conclu un nouveau contrat d’agence commerciale avec un autre mandant pour la prospection de tout ou partie de la même clientèle et ainsi perçu de nouvelles commissions (Cass. com. 16-11-2022 précité). Le principe vaut, à notre avis, que le contrat rompu ait été ou non à durée indéterminée.
Rappelons que l'agent n'a pas droit à l’indemnité compensatrice lorsque la résiliation résulte d'une faute grave qu'il a commise ou lorsqu'il a pris l'initiative de la rupture (sauf exceptions) ou lorsqu'il cède le contrat à un tiers (C. com. art. L 134-13).
Documents et liens associés :
Cass. com. 29-1-2025 n° 23-21.527 F-B