En rompant le contrat d’agence commerciale, un mandant indique à son agent qu’il n’a pas droit à une indemnité de fin de contrat car il a commis une faute grave en ne s’immatriculant pas au registre spécial des agents commerciaux.
La cour d’appel de Rennes juge au contraire qu’aucune faute grave ne peut être reprochée à l’agent commercial, et que l’indemnité de rupture est due par le mandant, pour les raisons suivantes :
l'immatriculation au registre spécial des agents commerciaux ne constitue qu'une mesure de police professionnelle. La directive européenne 86/653 du 18 décembre 1986, transposée à l'article L 134-1 du Code du commerce, s'oppose à toute réglementation nationale qui subordonnerait la validité d'un contrat d'agence commerciale à l'inscription du professionnel sur un registre prévu à cet effet et l'article L 134-1 ne subordonne pas l'application du statut des agents commerciaux à l'inscription sur ce registre spécial ;
le mandant avait poursuivi ses relations commerciales avec son agent malgré son défaut d'inscription au registre spécial et considérait donc que cette situation n'interdisait pas la poursuite du mandat d'intérêt commun.
A noter :
L'article 1er de la loi du 25 juin 1991 (devenu l'article L 134-1 du Code de commerce), transposant la directive de 1986, ne subordonne pas l'application du statut des agents commerciaux à l'inscription sur le registre spécial des agents commerciaux, qui est une mesure de police professionnelle (Cass. com. 7-7-2004 n° 02-17.107 F-PB : RJDA 12/04 n° 1314 ; Cass. com. 20-9-2011 n° 10-21.623 F-D : RJDA 1/12 n° 34).
Certes, l’agent commercial doit s’immatriculer au registre spécial tenu au greffe du tribunal de commerce dans le ressort duquel il est domicilié, avant de commencer l’exercice de ses activités (C. com. art. L 134-1 et R 134-6). Mais un défaut d’immatriculation ne le prive pas du bénéfice du statut protecteur édicté par le Code de commerce, notamment de l’indemnité qui lui est due en cas de rupture du contrat non provoquée par sa faute grave (art. L 134-13). Il en est ainsi depuis la loi du 25 juin 1991 (désormais C. com. art. L 134-1 s.), qui a transposé en droit interne la directive européenne de 1986, cette directive s'opposant à une réglementation nationale qui subordonne la validité d'un contrat d'agence à l'inscription de l'agent de commerce sur un registre prévu à cet effet (CJCE 30-4-1998 aff. 215/97).
Le mandant qui entend refuser de payer l’indemnité de rupture doit donc établir que le défaut d’immatriculation de l’agent, simple mesure de police professionnelle, a eu une incidence sur les rapports de droit privé existant entre eux et qu’il constitue une faute grave, c’est-à-dire portant atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt commun et rendant impossible le maintien du lien contractuel (Cass. com. 15-10-2002 n° 00-18.122 F-D). Mais la qualification de faute grave est écartée par les juges si le mandant a toléré la faute avant de l’invoquer pour refuser d’indemniser l’agent (notamment, pour d’autres manquements qu’un défaut d’immatriculation, Cass. com. 8-12-2009 n° 08-17.749 F-PB : RJDA 3/10 n° 235 ; Cass. com. 4-12-2024 n° 23-16.962 F-D : BRDA 2/25 inf. 7).
Documents et liens associés :
CA Rennes 17-12-2024 n° 23/05277