Si, à l'expiration de la durée du bail dérogatoire, et au plus tard à l'issue d'un délai d'un mois à compter de l'échéance, le locataire reste et est laissé en possession, il s'opère un nouveau bail dont l'effet est réglé par les dispositions relatives aux baux commerciaux (C. com. art. L 145-5, al. 2).
Un contrat de bail dérogatoire portant sur un local commercial est conclu pour une durée d’un an, ce contrat incluant une promesse de vente du local loué aux termes de laquelle le locataire doit faire connaître son intention de mettre en œuvre la promesse au plus tard un mois avant l’échéance du bail. Celui-ci ne formule aucune demande en ce sens et le bail se poursuit donc de manière tacite. Les parties se retrouvent donc liées par un bail commercial.
Après un différend avec le bailleur, le locataire agit en justice pour notamment voir ordonner la régularisation par écrit du bail commercial les liant.
La cour d’appel de Riom rejette la demande du locataire aux motifs suivants : chacune des parties admet que le bail dérogatoire initial a été converti en bail commercial ; or les dispositions du Code de commerces relatives aux baux commerciaux n'imposent pas qu'un bail commercial soit formalisé par écrit, sauf en matière de débits de boissons (CGI art. 504) et de baux supérieurs à douze ans (Décret 55-22 du 4-1-1955 art. 4 et art. 28, 1°-b) ; l’article L 145-5, al. 2 du Code de commerce organisant le régime de la fin du bail dérogatoire n'exige pas plus la formalisation du nouveau bail par écrit ; de manière générale, aucune disposition légale ou jurisprudentielle n'impose une telle condition formelle, les dispositions du Code civil relatives aux baux prévoyant d'ailleurs qu’un bail peut se faire par écrit ou verbalement (C. civ. art. 1714).
Le contrat de bail commercial peut donc être verbal (Cass. 3e civ. 16-6-2004 n° 03-11.383 FS-D : RJDA 10/04 n° 1098), ou conclu par acte sous signature privée ou authentique.
Enfin, il résulte de l’article L 145-5 précité que le bail se poursuit aux mêmes clauses et conditions que celles du bail expiré de telle sorte qu’aucune confusion ne semble pouvoir naître de la situation.
Ainsi, juge la cour, lorsqu’à l’expiration du contrat, le locataire reste et est laissé en possession et qu’il s’opère un nouveau bail, le statut des baux commerciaux s’applique automatiquement, se substituant au bail dérogatoire aux mêmes conditions et clauses que celles du bail expiré, à défaut de nouvelles conventions.
A noter :
Le bail est un contrat consensuel qui se forme dès qu'il y a accord des parties sur les éléments essentiels du contrat (CA Paris 19-11-1992 n° 92-3158). Ainsi jugé, en matière de bail commercial, qu’un bail verbal existe s'il y a eu un échange de mails entre les parties caractérisant un accord sur la chose, le prix et la durée du bail (CA Paris 4-4-2024 n° 22/10921 : RJDA 8-9/24 n° 442).
L'application du statut des baux commerciaux n'est donc pas subordonnée à la signature d'un écrit (par exemple, Cass. 3e civ. 12-12-1990 n° 1938 D : RJDA 2/91 n° 91 ; CA Paris 24-11-2000 : RJDA 5/01 n° 561). La décision commentée apporte une illustration supplémentaire de cette solution, cette fois-ci lorsque le bail commercial fait suite à un bail dérogatoire.
Précisons que l’écrit demeure nécessaire pour prouver l’existence du contrat ainsi que son contenu. En l’espèce, le bail commercial résultait du fait que le locataire, titulaire d’un bail dérogatoire, était resté dans les locaux ; le contrat se poursuivait donc aux clauses et conditions du bail expiré. Ainsi, tant l’existence du contrat que son contenu pouvaient être aisément établis.
Documents et liens associés :
CA Riom 5-6-2024 n° 22/02098