Aux termes de l’article L 8113–4 du Code du travail, les agents de contrôle de l'inspection du travail peuvent se faire présenter, au cours de leurs visites, l'ensemble des livres, registres et documents rendus obligatoires par ledit Code ou par une disposition légale relative au régime du travail. Le non-respect de ces dispositions rend l’employeur passible de sanctions.
Le délit d’obstacle à contrôle est constitué en cas de refus de fournir les documents demandés…
La non-communication des documents obligatoires, malgré des demandes réitérées de l'inspecteur du travail, est constitutive du délit d’entrave à l'exercice des fonctions d’un agent de contrôle puni d'un emprisonnement d'un an et d'une amende de 37 500 euros. (C. trav. art. L 8114-1).
Par exemple, l’employeur peut ainsi être condamné en cas de refus de transmettre les documents nécessaires au décompte de la durée du travail (Cass. Crim. 8-11-2005 n° 05-81.269 F-PF), de présenter le registre unique du personnel, lequel doit être tenu non seulement au siège de la société mais encore dans tout établissement où sont employés des salariés (Cass. crim. 31-1-2012 n° 11-85.226 F-PB) ou encore les justificatifs des dépenses exposées au titre de la formation professionnelle continue (Cass. crim. 14-10-2008 n° 07 84.365 F-PF).
…mais pas seulement
Est également constitutif du délit d’obstacle à contrôle la méconnaissance par l’employeur de ses obligations d’affichage et de tenue de documents, dans la mesure où cela rend tout contrôle impossible (notamment, Cass. crim. 14-4-2015 n° 14-83.267 F-PB : RJS 7/15 n° 513 pour un défaut d’affichage et d’enregistrement des horaires de travail).
Il en est de même de la communication de renseignements volontairement inexacts ou incomplets, comme, par exemple, la présentation d’un registre du personnel ne mentionnant pas tous les salariés occupés dans l’entreprise (Cass. crim. 27-10-1987 n° 87 80.432 P) ou de fausses déclarations en vue de dissimuler l'absence de versement de la subvention de fonctionnement du comité d'entreprise (Cass. crim. 15-3-2016, n° 14 87.989 F-PB).
L’arrêt du 25 avril 2017 s’inscrit dans le droit fil de cette jurisprudence. En l’espèce, l’employeur a été condamné notamment pour avoir communiqué, sur demande de l’inspecteur du travail à la suite d’un contrôle portant sur la durée du travail, des documents ne permettant pas de connaître la réalité, ni des heures supplémentaires réalisées par chacun des salariés à temps complet, ni des heures complémentaires effectuées par les salariés à temps partiel.
L’employeur ne peut se défendre en invoquant le droit de ne pas s’auto-incriminer
Pour sa défense, l’employeur prétendait bénéficier des droits consacrés par l’article 6 de la convention européenne des droits de l’Homme, notamment du droit au silence et celui de ne pas s’auto-incriminer. Il prétendait que ces droits excluent la possibilité pour les inspecteurs ou contrôleurs du travail d’obtenir des éléments de preuve par la contrainte ou les pressions au mépris de la volonté de la personne contrôlée.
En toute logique, la Haute Juridiction rejette cet argument et juge que le délit d’obstacle au contrôle des agents de l’inspection du travail ne constitue pas une atteinte au droit de ne pas s’auto-incriminer de l’employeur. En effet, la solution contraire conduirait à vider de toute substance ce délit.
A noter :
La chambre criminelle de la Cour de cassation avait déjà jugé, dans le même sens, que le droit au silence, garanti par les dispositions des articles 14 de Pacte international relatif aux droits civils et politiques et 6 de la Convention européenne des droits de l'Homme, ne s’opposait pas à l’exigence de communication de documents à des agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (Cass. crim. 24-2-2009, n° 08-84.410 : RJDA 8-9/09 no 785).
Pour en savoir plus sur le pouvoir de contrôle des agents de l'inspection du travail : voir Mémento Social nos 43720 s.