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Un hébergeur n’est pas tenu d’une obligation générale de surveillance des informations qu’il stocke

Un hébergeur ne peut pas être condamné à mettre en place un dispositif illimité dans le temps permettant de bloquer l’accès à des contenus illicites et portant sur les éventuels contenus à venir.

Cass. com. 27-3-2024 n° 22-21.586 F-B, Sté LBC c/ Sté Olivo


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©Getty Images

S'estimant victime d'annonces frauduleuses usurpant son identité, diffusées sur le site leboncoin.fr, une société poursuit en référé l'hébergeur de ce site, afin d'obtenir la cessation de la diffusion d'annonces faisant apparaître sa dénomination sociale, son RCS et son IBAN aux fins d'établir de faux devis ou de fausses commandes portant sur la commercialisation de certains produits.

La Haute Juridiction casse l’arrêt de la cour d’appel de Lyon ayant fait droit à cette demande.

Si l'autorité judiciaire peut prescrire, en référé ou sur requête, à tout hébergeur ou tout fournisseur d'accès à des services de communication au public en ligne, toutes mesures propres à prévenir un dommage ou à faire cesser un dommage occasionné par le contenu d'un tel service, elle ne peut pas soumettre cet hébergeur ou ce fournisseur d'accès à une obligation générale de surveillance des informations qu'il transmet et stocke ou de recherche des faits ou des circonstances révélant des activités illicites, qui l'obligerait à procéder à une appréciation autonome.

La cour d’appel ne pouvait pas valablement mettre à la charge de l’hébergeur un dispositif de blocage non seulement non limité dans le temps mais aussi qui, portant sur d'éventuelles annonces à venir, aboutissait à le soumettre à une obligation générale de surveillance des informations stockées, l'obligeant à une appréciation autonome du contenu de ces annonces.

A noter :

Les hébergeurs bénéficient d'une responsabilité allégée : ils ne peuvent pas voir leur responsabilité civile engagée du fait des informations stockées s’ils n'avaient pas effectivement connaissance de leur caractère illicite ou de faits et circonstances faisant apparaître ce caractère ou si, dès le moment où ils en ont eu connaissance, ils ont agi promptement pour retirer ces données ou en rendre l'accès impossible (Loi 2004-575 du 21 juin 2004, dite « LCEN », art. 6, I-2). Ils sont présumés connaître le caractère illicite d’un contenu lorsque la victime le leur a notifié, en application de l’article 6, I-5 de la LCEN, et leur responsabilité est engagée s’ils n’ont pas retiré le contenu (retrait appelé « take down ») dans un prompt délai.

Cette obligation de retrait du contenu peut-elle être assortie de l’obligation de veiller à ce que le contenu concerné ne réapparaisse pas (« notice and stay down ») ?

Comme la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE 6-2-2012 aff. 360/10), la Cour de cassation a répondu par la négative : un hébergeur ne peut pas être condamné à prendre toutes mesures utiles pour prévenir de nouvelles mises en ligne du contenu litigieux, sans nouvelle notification régulière, une telle interdiction aboutissant à le soumettre, au-delà de la seule faculté d'ordonner une mesure propre à prévenir ou à faire cesser le dommage lié au contenu actuel du site en cause, à une obligation générale de surveillance des contenus qu'il stocke et de recherche des reproductions illicites et à lui prescrire, de manière disproportionnée par rapport au but poursuivi, la mise en place d'un dispositif de blocage sans limitation dans le temps (Cass. 1e civ. 12-7-2012 n° 11-13.666, n° 11-13.669 et n° 11-15.188).

La CJUE a cependant précisé qu’un juge peut enjoindre à un hébergeur de supprimer les informations stockées dont le contenu est identique ou équivalent à celui d’une information déclarée illicite précédemment à condition que l’hébergeur ne soit pas contraint de procéder à une appréciation autonome de ce contenu (CJUE 3-10-2019 aff. 18/18).

L’interdiction d’imposer aux hébergeurs une obligation générale de surveillance des informations qu’il stockent est issue de l’article 15 de la directive 2000/31 du 8 juin 2000, dite « Commerce électronique », transposée par la LCEN. Elle est reprise par le récent règlement UE sur les services numériques (Digital Services Act, DSA), qui conserve un régime de responsabilité allégée pour les fournisseurs de services intermédiaires (DSA art. 8).

Documents et liens associés : 

Cass. com. 27-3-2024 n° 22-21.586 F-B

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