Des époux décèdent à quelques années d’intervalle, en 2009 et 2012, laissant quatre enfants.
Par actes des 23 mars 2001 et 19 juillet 2005, l’époux avait consenti à l’un des enfants des donations d’immeubles, le second acte stipulant que les donations seraient rapportables en moins prenant pour leur valeur « à ce jour », dans l’état où les biens se trouvaient au jour du premier acte.
Par ailleurs, par acte du 25 septembre 2003, les deux époux avaient consenti à un autre enfant une donation de somme d’argent.
Des difficultés sont survenues lors des opérations de comptes, liquidation et partage des intérêts patrimoniaux du couple et de leurs successions.
S’agissant des indemnités de rapport au titre des trois donations, la cour d’appel estime que les intérêts au taux légal sur les sommes dues courent à compter de la date de son arrêt, retenant que le montant du rapport est déterminé à cette date.
Cassation au visa de l’article 856, alinéa 2 du Code civil. Selon ce texte, les intérêts des choses sujettes à rapport ne sont dus qu'à compter du jour où le montant du rapport est déterminé. Il en résulte que les intérêts courent à compter du jour du décès lorsque :
le montant du rapport est fixé par l'acte de donation à la valeur du bien au jour de la donation ;
le rapport est celui d'une donation de deniers.
A noter :
Confirmation de jurisprudence (Cass. 1e civ. 14-5-1992 n° 90-12.275 : Bull. civ. I n° 142, RTD civ. 1993 p. 175 obs. J. Patarin ; Cass. 1e civ. 6-11-2013 n° 12-16.625 FS-PBI : Sol. Not. 1/14 inf. 13). La solution est logique car, dans les deux cas concernés ici, le montant du rapport est connu au jour de l’ouverture de la succession. S’agissant de la donation de somme d’argent, la solution n’est cependant recevable que si les deniers n’ont pas été employés dans l’acquisition d’un bien déterminé. Dans le cas contraire, le rapport serait de la valeur du bien acquis à l'époque du partage, selon son état à l’époque de l’acquisition, et les intérêts, calculés sur cette valeur, ne courraient que du jour de sa liquidation.
Une précision, enfin, sur la clause dérogatoire aux règles légales d’évaluation du rapport de la donation de 2001, stipulée dans l’acte de 2005 (la lecture de l’arrêt d’appel révèle que l’acte de 2005 comportait, outre cette clause, un abandon d’usufruit sur l’un des biens donnés en 2001). On pourrait s’interroger sur la validité du procédé, le Code civil ne visant que la stipulation contraire « dans l’acte de donation » (C. civ. art. 860, al. 3). Autrement dit, peut-on valablement aménager le rapport dans un acte distinct, postérieur à celui de la donation concernée ? Les auteurs l’admettent, sous réserve que cet acte adopte la forme authentique, précaution nécessaire si la clause aboutissait à un supplément de libéralité (P. Catala : La réforme des liquidations successorales, Defrénois 3e éd. 1982, n° 59 bis ; F. Terré, Y. Lequette et S. Gaudemet : Droit civil. Les successions. Les libéralités, Dalloz 4e éd. 2014, n° 1089 ; M. Grimaldi : Droit des successions, LexisNexis 8e éd. 2020, n° 769). Si la clause allège l’obligation au rapport, elle pourrait même résulter d’un testament (F. Terré, Y. Lequette et S. Gaudemet, précités ; M. Grimaldi, précité). On notera toutefois que cette question n’était pas dans le débat.
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