L’exploitant d’une station essence échange son terrain avec une société. L’acte d’échange indique que la société renonce à tout recours sur l’état du sol et du sous-sol de l’immeuble, et qu’elle garantit l’exploitant contre les réclamations des tiers à ce sujet. Il précise que le terrain a fait l’objet d’une opération de dépollution et que la société en fait son affaire personnelle. La société revend le terrain. Le sous-acquéreur ayant à peine démarré les travaux, une pollution aux hydrocarbures est révélée impliquant l’arrêt des travaux. Il assigne la société et l’exploitant de l’ancienne station essence, vendeurs successifs, pour non-respect de l’obligation de dépollution d’une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE), pour manquement à leur obligation de délivrance conforme et en garantie des vices cachés.
La Cour de cassation juge que la cour d’appel a énoncé à bon droit que le sous-acquéreur jouit de tous les droits et actions attachés à la chose qui appartenait à son auteur et dispose à cet effet contre le vendeur initial des actions contractuelles directes fondées sur la non-conformité de la chose livrée. La clause de l’acte d’échange et le rapport technique annexé induisaient que le terrain était complètement dépollué et il n’est pas établi que la société avait accepté le risque d’une pollution résiduelle. Le terrain n’est donc pas conforme au contrat, l’exploitant a manqué à son obligation de délivrance. Néanmoins, elle casse l’arrêt en ce qu’il a condamné la société in solidum avec l’exploitant sur le fondement du manquement à son obligation de délivrance alors que la clause de pollution n’est pas reprise dans l’acte de vente au profit du sous-acquéreur. Elle retient que l’inconstructibilité du terrain constitue un vice caché et non pas un défaut de conformité.
Suivez les dernières actualités en matière immobilière et assurez la relance d’activité pour vos clients ou votre entreprise avec Navis Immobilier :
Pas encore abonné ? Nous vous offrons un accès au fonds documentaire Navis Immobilier pendant 10 jours.
A noter :
1. La Cour de cassation maintient sa position sur le manquement à l’obligation de délivrance en cas de pollution résiduelle quand l’acte indique que le terrain a été dépollué (Cass. 3e civ. 29-2-2012 n° 11-10.318 FS-PB : BPIM 2/12 inf. 140). Si l’acquéreur a connaissance du risque d’une pollution résiduelle et l’accepte expressément, il n’y a pas de manquement du vendeur (Cass. 3e civ. 16-1-2013 n° 11-27.101 FS-PBR : BPIM 2/13 inf. 137). En l’espèce, c’est ce que défendait l’exploitant. Selon lui, le manquement à son obligation de délivrance conforme était apprécié à tort au regard du projet du sous-acquéreur, non contractualisé dans l’acte d’échange. S’agissant d’une ICPE, en cas de cessation d’activité, il incombe à l’exploitant de remettre le site dans un état tel qu'il ne puisse pas porter atteinte à la santé, à la sécurité ou à la salubrité publique et qu'il permette un usage futur du site (C. envir. art. L 512-12-1). Un arrêté préfectoral postérieur à l’acte d’échange lui avait d’ailleurs ordonné de remettre le site en l’état. Malgré la clause visant à le décharger de tout recours, l’exploitant ne pouvait pas s’exonérer de son obligation de dépolluer le site afin d’assurer la compatibilité du sol avec l’usage destiné au terrain.
2. Une action du sous-acquéreur sur le fondement de la garantie des vices cachés aurait pu aboutir car la pollution d’un terrain, non connue de l’acquéreur, le rend impropre à sa destination si toute construction présente un risque pour la santé et la sécurité des personnes (Cass. 3e civ. 8-6-2006 n° 04-19.069 FS-PB : RJDA 11/06 n° 1125).