Un litige naît à propos d’une non-opposition à déclaration préalable portant sur la création de 4 lots dans un lotissement. Cette création contreviendrait à une clause du cahier des charges relative au nombre maximal de lots. Avant de statuer sur le litige, le tribunal administratif de Nantes interroge le Conseil d’État sur la nature de cette clause. S’agit-il d’une règle d’urbanisme susceptible d’être frappée de caducité au terme des 10 années suivant l’autorisation de lotir, comme le prévoit l’article L 442-9 du Code de l’urbanisme ?
Cet article pose le principe de mise en concordance automatique des documents du lotissement (règlement, cahier des charges approuvé ou non, etc.) avec les règles actuelles d'urbanisme : dès lors qu'un PLU ou un POS est approuvé, les règles d'urbanisme propres aux lotissements existants cessent de s'appliquer 10 ans après la date de l'autorisation de lotir (C. urb. art. L 442-9, al. 1 ). Si les règles d’urbanisme propres au lotissement ont été maintenues en vigueur à la demande des colotis - ils en avaient la possibilité avant la loi Alur 2014-366 du 24-3-2014 - elles sont devenues caduques, en présence d’un PLU, lors de l’entrée en vigueur de la loi Alur, soit dès le 27 mars 2014 (C. urb. art. L 442-9, al. 2). Mais ces règles de caducité au plan urbanistique ne remettent pas en cause les droits et obligations régissant les rapports entre les colotis définis dans le cahier des charges, ni le mode de gestion des parties communes (C. urb. art. L 442-9, al. 3).
Pour le Conseil d’État, compte tenu de son objet et de ses effets, la mention relative au nombre maximal de lots contenue dans le cahier des charges approuvé d'un lotissement, qui au demeurant fait partie des éléments soumis à autorisation lors de la création d'un lotissement, constitue une règle d'urbanisme. Lorsque le lotissement est couvert par un PLU, une telle limitation du nombre de lots cesse donc de s'appliquer au terme de 10 années à compter de la délivrance de l'autorisation de lotir et devient inopposable à l’occasion d’une demande d’autorisation d’urbanisme. De même, si une majorité de colotis avait demandé le maintien de cette règle au terme des 10 ans, elle a cessé de s’appliquer dès le 27 mars 2014, date d'entrée en vigueur de la loi Alur.
En revanche, comme le précise la loi, les clauses du cahier des charges du lotissement continuent de régir les rapports entre les colotis. Pour éviter qu’un coloti n’invoque la violation du cahier des charges alors même que l’autorisation délivrée est conforme à la réglementation d’urbanisme, le Conseil d’État précise que la caducité de la clause n’empêche pas l’administration d’user des pouvoirs qu'elle tient du Code de l’urbanisme, notamment s’agissant des subdivisions de lots, pour modifier le cahier des charges (C. urb. art. L 442-10, L 442-11, L 442-12 et R 442-21).
À noter : Il a déjà été jugé que les indications du plan de division parcellaire d'un lotissement sont des règles d’urbanisme (Avis CE 5-7-1991 n° 124072 : Lebon p. 274).
Dans l’avis commenté, le Conseil d’État se prononce sur les règles de caducité prévues par l’article L 442-9 du code de l’urbanisme (al. 1 et 2), leur articulation avec la nature contractuelle du cahier des charges dont les clauses continuent à régir les rapports entre les colotis (al. 3) et enfin, sur les moyens offerts à l’administration pour modifier une clause du cahier des charges afin de la mettre en concordance avec la réglementation locale d’urbanisme. L’article L 442-10 du Code de l’urbanisme permet à l’autorité compétente, si une majorité qualifiée des colotis le demande ou l’accepte, de modifier les documents du lotissement dans le respect de la réglementation d’urbanisme. L’article L 442-11 prévoit que la même autorité peut, après enquête publique, modifier les documents du lotissement pour les mettre en concordance avec un PLU approuvé après l’autorisation de lotir. Enfin, selon les articles L 442-12 et R 442-21, les subdivisions de lots sont, sous réserve de certaines exceptions, assimilées à des modifications des règles du lotissement.
Juliette COURQUIN
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Urbanisme Construction n° 27270