Un commerçant, radié du registre du commerce et des sociétés depuis un an, est mis en liquidation judiciaire sur demande de l’administration fiscale pour non-paiement de la TVA due avant sa radiation. La date de cessation de ses paiements est fixée à une date postérieure à sa radiation. Il conteste l’ouverture de la procédure collective en développant l'argumentation suivante : la liquidation judiciaire ne peut être prononcée qu'à l'égard d'une entreprise en cessation des paiements et, lorsqu'elle est ouverte après l'arrêt de l'activité professionnelle, le passif doit en outre provenir de cette activité ; il en déduit que la liquidation ne peut être ouverte après l'arrêt de l'activité qu'à la condition que la cessation des paiements soit antérieure, ce qui n’était pas le cas.
La Cour de cassation écarte ce raisonnement. Depuis l'entrée en vigueur de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire à l'égard d'un commerçant radié du RCS n'est pas soumise à la condition que soit établi un état de cessation des paiements antérieur à la radiation, dès lors qu’existe, lors de l’examen de la demande d’ouverture de la procédure, un passif résiduel exigible à caractère professionnel auquel l'ancien commerçant est dans l'impossibilité de faire face avec son actif disponible.
A noter : solution inédite.
Avant la réforme issue de la loi de sauvegarde de 2005, une personne physique commerçante qui avait cessé son activité et avait été radiée du RCS ne pouvait être mise en redressement judiciaire que si son état de cessation des paiements était antérieur à la radiation ; pour un artisan ou un agriculteur, cet état devait préexister à la cessation d’activité (C. com. ex-art. L 621-15, I et L 622-1, al. 2).
En conséquence, un professionnel qui n’était pas en état de cessation au moment où il arrêtait son activité ne pouvait plus ensuite relever des procédures collectives prévues par le Code de commerce ni de la procédure de surendettement organisée par le Code de la consommation, celle-ci étant alors exclue pour un passif d’origine professionnelle (C. consom. ex-art. L 330-1).
La loi de sauvegarde a supprimé la condition relative à l’antériorité de la cessation des paiements. Le redressement et la liquidation judiciaires peuvent être ouverts à l’égard d’un débiteur, après qu’il a cessé son activité, si tout ou partie de son passif provient de cette dernière (C. com. art. L 631-3, al. 1 et L 640-3, al. 1). Le principe vaut non seulement pour les commerçants, artisans et agriculteurs, mais aussi pour toute autre personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante (art. L 631-3, al. 1 et, sur renvoi, art. L 631-2, al. 1). Si le débiteur relève de la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, le surendettement est exclu (C. consom. art. L 711-3 ; ex-art. L 333-3), quelle que soit la nature de son passif (Cass. 2e civ. 23-6-2016 n° 15-16.637 F-PB : BRDA 18/16 inf. 8).
Par ailleurs, contrairement au régime antérieur (C. com. ex-art. L 621-15, III et, sur renvoi, ex-art. L 621-2), l’intéressé peut demander lui-même l’ouverture de la procédure (Cass. avis 17-9-2007 n° 0700010 P : RJDA 12/07 n° 1255) et le tribunal ne peut plus se saisir d’office. Les créanciers doivent, comme auparavant, agir dans un délai d’un an à compter de la radiation ou de la cessation d’activité (art. L 631-5). Lorsque le débiteur est un agriculteur, l’ouverture de la procédure est subordonnée à une demande préalable de règlement amiable agricole (C. rur. art. L 351-1).
Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Droit commercial n° 51010