Publié fin mars 2024, un nouveau guide de l'agence française anticorruption (AFA) a pour objectif de sécuriser les opérations de parrainage et de mécénat, dont le poids financier a représenté plus de 2,3 milliards d'euros en 2021.
Le guide comprend 77 pages.
Après une description des différents types d'opérations, il présente en premier lieu les risques d'atteintes à la probité qui y sont liés. Des schémas de corruption, trafic d'influence, prise illégale d'intérêts, favoritisme, détournement de biens publics ou encore concussion sont expliqués afin de sensibiliser les entreprises et leur permettre de compléter leur cartographie des risques. L'un des exemples donnés est celui du dirigeant d'une entreprise de construction qui souhaite contracter auprès d'un fournisseur de matières premières. Le responsable commercial du fournisseur, chargé des négociations contractuelles, propose à l'entreprise de construction de lui fournir des matières premières à prix réduits si elle accepte en contrepartie de réaliser une opération de parrainage pour une association sportive dont il est membre ; si le dirigeant accepte, il pourrait être (ainsi que l'entreprise de construction) poursuivi pour corruption privée active et le responsable commercial du fournisseur de matières premières pour corruption privée passive.
La seconde partie du guide est consacrée à la prévention et à la détection des atteintes à la probité dans les opérations de parrainage et mécénat. Gouvernance, cartographie des risques, politiques et procédures, formation, évaluation des organismes bénéficiaires, alerte ou encore contrôles internes : les piliers de la compliance anticorruption sont déclinés en 12 bonnes pratiques à adapter notamment selon la taille de l'entreprise.
Il est ainsi préconisé de désigner un responsable de l'instruction et du suivi des dossiers de parrainage et de mécénat n'intervenant pas dans la décision et de privilégier une prise de décision collégiale, par exemple par la constitution d'un comité dédié.
L'AFA conseille également d'établir une convention écrite pour chaque opération afin de formaliser les obligations respectives des parties et leur engagement en matière de lutte contre la corruption.
L'évaluation des organismes bénéficiaires d'une opération de mécénat ou de parrainage au regard du risque de corruption est recommandée, en prenant en compte certains éléments comme la concomitance d'une relation commerciale avec lui, sa dépendance économique ou la présence de personnes publiques.
L'ouverture du dispositif d'alerte interne aux personnels de ces organismes ou encore la mise en place d'un suivi spécifique des opérations comptables liées au parrainage et au mécénat font aussi partie de ces bonnes pratiques.
En annexe du guide, des précisions sont données sur le cadre juridique des opérations de parrainage et mécénat, notamment sur leur régime fiscal. Enfin, l'AFA donne des conseils pratiques permettant aux entreprises d'adopter une politique et un procédure spécifiques pour ces opérations, en exposant les « points-clefs » de cette mise en œuvre (processus décisionnel, encadrement et traçabilité du don ou du soutien, encadrement des contreparties, etc.).
A noter :
1° Ce guide pratique est le fruit d'une démarche collaborative de l'AFA. Répondant à une forte demande des entreprises, il a été élaboré par un groupe de travail interministériel, a été soumis à la consultation publique puis a été adapté aux commentaires des entreprises, afin que ses propositions tiennent compte des contraintes opérationnelles de celles-ci. A noter que la distinction initiale entre mécénat et parrainage a été estompée dans la version finale du guide car, en pratique, elle donne lieu à une évaluation du risque similaire.
2° L'AFA a rappelé que ce guide pratique, comme les précédents, n'a pas de caractère contraignant : il ne crée pas d'obligation juridique pour les entreprises auxquelles il s'adresse. Il complète, précise et illustre les recommandations de l'AFA et doit être pris comme une « source d'inspiration » pour les entreprises, qui en adapteront les propositions en fonction des risques identifiés dans leur secteur d'activité ou leur zone géographique et selon leur taille. Cependant, en cas de contrôle de l'AFA, il est probable que la mise en place des bonnes pratiques développées dans ce guide soit prise en compte par les agents car ces pratiques participent de l'engagement des dirigeants à se conformer au dispositif anticorruption imposé par la loi Sapin 2.