En 2013, le propriétaire d'un local commercial le loue à une société et le représentant de celle-ci se porte caution. Le bailleur demande ultérieurement la condamnation du locataire au paiement des loyers, solidairement avec la caution. La caution lui oppose la nullité de son engagement sur le fondement de l’ancien article L 341-2 du Code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance 2016-301 du 14 mars 2016, applicable au litige, qui prévoit que les mentions manuscrites émanant de la caution, prescrites à peine de nullité de son engagement, doivent précéder sa signature.
Une cour d'appel condamne la caution à payer en retenant que, si les mentions écrites de la main de la caution figuraient après sa signature, elles étaient néanmoins suivies de son paraphe, de sorte que ni le sens ni la portée de son engagement n'en étaient affectés et qu'il n'existait aucune ambiguïté sur la date de l'acte et sur l'existence du consentement de la caution.
La troisième chambre civile de la Cour de cassation censure cette décision : le cautionnement n'était pas valable dès lors que la signature de la caution précédait ses mentions manuscrites.
A noter :
1° Il existe une divergence jurisprudentielle entre la première chambre civile et la chambre commerciale de la Cour de cassation sur la question de la validité d'un cautionnement lorsque la signature de la caution n'est pas placée sous sa mention manuscrite.
La chambre commerciale juge que cette circonstance rend le cautionnement nul. Ainsi en est-il lorsque la caution a apposé sa signature sous des mentions préimprimées et avant la mention manuscrite (Cass. com. 17-9-2013 n° 12-13.577 FS-PB : RJDA 12/13 n° 1050 ; Cass. com. 15-3-2023 n° 21-21.840 F-D : RJDA 7/23 n° 402), lorsque les mentions manuscrites entourent sa signature (Cass. com. 26-6-2019 n° 18-14.633 F-D : RJDA 12/19 n° 787) ou lorsqu'elles figurent sous la signature et qu'elles sont suivies d'un paraphe (Cass. com. 23-10-2019 n° 18-11.825 F-D : RJDA 2/20 n° 109). Elle a en revanche admis la validité du cautionnement en cas d'interposition, entre la mention manuscrite et la signature, d'un ajout ou d'une clause préimprimée n'affectant pas le sens et la portée de la mention manuscrite (Cass. com. 5-12-2018 n° 17-26.237 F-D : RJDA 2/19 n° 135), ou dans un cas où la caution avait signé au milieu de la mention manuscrite et non en dessous, faute de place en bas de page (Cass. com. 28-6-2016 n° 13-27.245 F-D : RJDA 10/16 n° 733).
De son côté, la première chambre civile juge au contraire que le cautionnement est valable lorsque la mention manuscrite, bien que figurant sous la signature de la caution, est immédiatement suivie du paraphe de celle-ci, de sorte que ni le sens ni la portée de la mention ne s'en trouvent affectés (Cass. 1e civ. 22-9-2016 n° 15-19.543 F-PB : RJDA 12/16 n° 904).
Avec l'arrêt commenté, la troisième chambre civile adopte la même position que la chambre commerciale.
2° La solution est transposable au régime issu de l'ordonnance 2016-301 du 14 mars 2016 prévoyant des dispositions similaires à celles de l'ancien article L 341-2 (C. consom. art. L 331-1 et L 314-15), pour les cautionnements conclus avant le 1er janvier 2022.
En revanche, elle ne l'est pas, à notre avis, pour les cautionnements souscrits depuis cette date, qui sont soumis au nouvel article 2297 du Code civil (issu de l'ord. 2021-1192 du 15-9-2021 ayant réformé le droit des sûretés), lequel prévoit que la caution personne physique doit, à peine de nullité de son engagement, apposer elle-même la mention qu'elle s'engage en qualité de caution à payer au créancier ce que lui doit le débiteur en cas de défaillance de celui-ci, dans la limite d'un montant en principal et accessoires exprimé en toutes lettres et en chiffres. Il n'y a aucune indication concernant la signature, ce qui laisse au juge le soin d'apprécier au cas par cas si son positionnement dans l'acte assure ou non la pleine compréhension par la caution de la portée de son engagement.
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