Après le décès d’un homme survenu au Royaume-Uni, est dressé, à la requête de sa veuve, un acte de notoriété, sur lequel elle seule figure. La fille du défunt, qui finit par être informée fortuitement de la mort de son père, fait à son tour établir une notoriété, rectificative. Elle porte plainte notamment pour faux et usage de faux ou tentative de ces délits, affirmant que sa belle-mère avait connaissance de son existence et de sa filiation.
La cour d’appel ne retient pas une telle qualification : un notaire n’est ni une administration publique ni un organisme chargé d’une mission de service public mais un officier public ou ministériel. Par conséquent, le délit consistant à se faire délivrer indûment par une administration publique ou par un organisme chargé d’une mission de service public, par quelque moyen frauduleux que ce soit, un document destiné à constater un droit, une identité ou une qualité ou à accorder une autorisation n’est pas caractérisé (C. pén. art. 441-6).
Confirmation de la Cour de cassation, qui reconnaît là une exacte application du texte visé par les juges du fond.
A noter :
Est puni, par le Code pénal, de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende le fait de se faire remettre indûment, par une administration publique ou par un organisme chargé d’une mission de service public, un document destiné à se prévaloir d’un droit, d’une identité ou d’une qualité, ou le fait de fournir une déclaration mensongère en vue d’obtenir de l’administration un paiement ou un avantage indu (C. pén. art. 441-6). Mais ce délit pénal ne peut trouver à s’appliquer aux actes notariés. En effet, le notaire ne peut pas être assimilé à une administration publique ou à un organisme chargé d’une mission de service public au sens de ce texte, comme nous l’enseigne cet arrêt à propos d’un acte de notoriété.
Dans cette affaire, une autre question était posée (1e moyen) : les déclarations de la veuve sur la base desquelles le notaire a dressé l’acte de notoriété après le décès de son mari étaient-elles constitutives du délit d’escroquerie (C. pén. art. 313-1) ? Non répond la Cour de cassation, confirmant également sur ce point l’analyse des juges du fond. L’escroquerie suppose en effet de tromper quelqu’un soit par l’utilisation d’un faux nom ou d’une fausse qualité, soit par l’abus d’une vraie qualité, soit en employant des manœuvres frauduleuses (mais non par un simple mensonge). L’affirmation de son statut de conjoint survivant devant le notaire ne peut être assimilée à une fausse qualité car il s'agit de la pure affirmation d'un droit, sans en faire usage à l’occasion d’une « activité particulière liée à cette qualité ». Par ailleurs, à supposer qu’elle ait menti, affirmer être la seule héritière ne suffit pas à caractériser l’élément matériel de l’infraction, à défaut d’être accrédité par des éléments extérieurs. Enfin, l’éventuel mensonge n’était pas destiné à tromper une autre personne que celle qui était censée lui donner force et crédit.
L’histoire ne dit pas si la fille du défunt a également engagé une action au civil pour recel d’héritier (C. civ. art. 730-5 qui renvoie à art. 778), qui aurait toutes les raisons de prospérer nous semble-t-il.