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À chaque vocation successorale son droit d’opter, d’interpeller et d’obtenir un délai

L’héritière par la loi instituée légataire particulier peut être mise en demeure d’accepter ou renoncer à son legs par ses cohéritiers sans égard à sa vocation légale ; un délai supplémentaire pour opter est accordé si elle justifie d’un intérêt sérieux et légitime actuel.

CA Bourges 22-8-2024 n° 23/00626


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©Getty Images

Par testament, une mère institue l’une de ses enfants légataire de la quotité disponible et légataire à titre particulier, « c’est-à-dire la maison [en fait de maison, un château], le parc, les dépendances, la petite maison et la ferme et la partie des terres et / étangs qu’elle prendra la première dans sa part et dans la proportion à sa convenance… » À son décès, certains des cohéritiers de l’héritière ainsi gratifiée la somment d’accepter le legs ou d’y renoncer et, le cas échéant, de préciser l’assiette qu’elle entend lui donner. En réponse, elle obtient en référé une expertise judiciaire du patrimoine successoral. Par ailleurs, elle requiert un délai supplémentaire de deux ans à compter de la décision à intervenir pour opter sur la succession de sa mère.

Le juge de première instance refuse, considérant qu’elle a déjà tacitement accepté la succession, au titre de sa vocation légale. Le juge d’appel confirme, mais pour une autre raison. Si la fille pouvait prétendre obtenir un délai pour opter, au titre de sa vocation testamentaire, dans l’attente de l’estimation du patrimoine successoral judiciairement ordonnée, le rapport d’expertise a, depuis l’appel, été déposé. Elle est, depuis six mois au jour où la cour d’appel statue, en mesure de déterminer le montant de son legs particulier, de le composer à sa guise et de prendre conseil. Sans autres motifs sérieux et légitimes allégués, impossible de donner une suite favorable à sa requête.

A noter :

On le sait, quatre mois après l’ouverture de la succession, l'héritier peut être sommé d’opter (C. civ. art. 771). Il dispose alors de deux mois pour prendre parti ou solliciter un délai supplémentaire auprès du juge lorsqu'il n'a pas été en mesure de clôturer l'inventaire commencé ou lorsqu'il justifie d'autres motifs sérieux et légitimes (C. civ. art. 772). L’affaire commentée soulève deux questions relatives à cette action interrogatoire :

  • quels motifs sérieux et légitimes sont susceptibles de justifier l’obtention d’un délai supplémentaire pour opter ? L’estimation du patrimoine successoral, par exemple, comme l’illustre l’espèce où l’un des héritiers légaux est non seulement instituée légataire à titre particulier d’un château et de ses dépendances mais se voit reconnaître la faculté de cantonner son legs. Pour prendre position, il lui est nécessaire de connaître la composition de l’intégralité du patrimoine et son estimation. Encore faut-il qu’à la date à laquelle le juge examine la demande de prolongation du délai, l’expertise n’ait pas été rendue… ;

  • comment s’exerce cette action en cas de cumul des vocations successorales ? Ici, la fille de la défunte était à la fois héritière légale et légataire. Pour chacune de ces vocations, la personne dispose d’un droit d’option autonome, nous rappelle la cour d’appel (C. civ. art. 769, al. 2). En l’espèce, la fille était interrogée au sujet de sa seule vocation testamentaire par ses cohéritiers. Il était donc hors sujet de caractériser l’acceptation tacite de la succession légale pour écarter la recevabilité de sa demande de délai supplémentaire pour accepter ou renoncer à son legs, comme l’a fait le juge de première instance. À cet égard, celui-ci a considéré que la demande reconventionnelle dans la procédure expertise d’expulser toute personne qui pénétrerait sur la propriété léguée ne pouvait qu’émaner d’une personne se considérant comme la propriétaire des lieux conduite à protéger son droit et vaut acceptation tacite de la succession. Pour résumer, à chaque vocation successorale son droit d’option, son droit à exercer l’action interrogatoire afférente et, le cas échéant, son droit de demander un délai supplémentaire pour opter.

Pour terminer, une observation quant au contenu de l’acte de sommation. Il mentionnait que « dans l’hypothèse avérée d’atteinte à la réserve, les requérants sollicitent expressément la réduction du legs et la mettent en demeure de prendre parti pour une réduction en valeur ou en nature lui rappelant les termes de l’article 924-1 du Code civil ainsi rédigé […] ». Mais un tel acte ne vaut que pour ce qu’il est : une interrogation sur l’option successorale de l’héritier taisant. Il ne nous semble pas pouvoir valoir demande expresse de réduction du legs qui est conditionnée aux calculs à venir de l’atteinte à la réserve, ni mise en demeure d’opter dans les trois mois qui suivent pour la réduction en nature.

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© Editions Francis Lefebvre - La Quotidienne

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